Une pute arrive dans une chambre d'un hôtel miteux pour y faire une passe et se retrouve face à deux frères siamois.Effrayée et dégoûtée,elle s'enfuit.Puis revient et finit par sympathiser avec les gars.Ce film avait à sa sortie exagérément excité la critique,sans doute à cause de son sujet original et osé.Mais ces scènes mornes captées par une caméra statique et cette image moche servant d'écrin à des décors sombres et déprimants ne suscitent guère d'enthousiasme.Surtout si on compare "Les frères Falls" au très ressemblant "Des monstres et des hommes",film génial d'Alexeï Balabanov sorti six mois plus tôt,avec lequel il présente des similitudes troublantes.Là aussi,on a des siamois,eux aussi musiciens et exploités tels des bêtes de foire,eux aussi finissant séparés par une opération.Sauf que le film russe était beaucoup plus noir,âpre,cruel,pessimiste et puissant.Les frangins Polish ont eux préféré rester dans les clous du cinéma américain classique et nous infligent un mélo larmoyant quelque peu indigeste.L'accent est mis sur la description de cette anomalie physique que représentent les siamois,au point qu'on a parfois l'impression d'assister à un documentaire médical.Le paradoxe psychologique qui agite les personnages est cependant bien mis en lumière,les deux frères étant tiraillés entre leur envie d'autonomie et de liberté et leur interdépendance organique aboutissant à la peur de devoir exister séparés.Mais le thème véritable,au-delà du problème des siamois,est évidemment celui de l'acceptation de la différence.Et comme le faisait Balabanov,les Polish utilisent l'effet-miroir entre la monstruosité physique des siamois et la monstruosité morale des gens "normaux" qui gravitent autour d'eux.Curiosité malsaine,tentatives d'exploitation spectaculaire de ce handicap,peur ou mépris,les réactions diverses ne font pas honneur au genre humain.L'interprétation,d'un niveau inégal,est dominée par Mark et Michael Polish,excellents dans les rôles des Falls,et qui sont par ailleurs les co-auteurs de l'histoire,Michael assurant en outre la réalisation.Précisons qu'ils sont réellement jumeaux,mais pas siamoisLes apparitions des chevronnés Patrick Bauchau et Lesley Ann Warren améliorent la qualité d'ensemble.Retenons pour conclure la très belle chanson illustrant le générique de fin,le délicieusement bluesy "Don't grow" de Marc Anthony Thompson.