Il y’a quelque chose d’absolument fou dans la simple idée qu’un film comme Les Gardiens de la Galaxie puisse non seulement être porté à l’écran de façon correcte, mais surtout générer une attente laissant imaginer un possible carton au box-office. Pensons-y: une propriété peu connue, un casting de B-lister et concept si génialement absurde qu’il semble destiné à n’exister que comme cult movie vivant sous les radars du grand public. Et pourtant la machine à hype qu’est devenu Marvel Studios depuis son débarquement en 2008 avec Iron Man semble avoir fait son travail. En dépit des obstacles dressés sur son chemin, Les Gardiens de la Galaxie est probablement le meilleur ajout à cet univers cinématographique depuis son lancement il y’a six ans.


Avec Les Gardiens de la Galaxie entre les mains, le réalisateur James Gunn (auteur des sympathiques mais surévalués Super et Slither) part pour une mission délicate: introduire une dizaine de nouveaux personnages, assurer un arc et un développement cohérent pour la majorité d’entre eux et inclure l’ensemble dans la narration globale de l’univers Marvel. Le résultat aurait facilement pu devenir encombré, indigeste, illisible. Heureusement pour le spectateur, Gunn et sa scénariste Nicole Perlman savent à peu près ce qu’ils font. Malgré un manque de subtilité presque gênant dans l’écriture des dialogues d’exposition, Les Gardiens de la Galaxie se déroule sans trop d’accroche, sans trop de manque de clarté, sans trop d’erreurs. Et surtout, en parvenant à laisser à chaque personnage sa part d’honneur, sans laisser le moindre manque de cette équipe d’improbables héros à la ramasse.



Là où Joss Whedon disposait de quatre films produits en amont pour amener ses Avengers à interagir entre eux, Gunn et Perlman se doivent de parvenir au même point en à peine plus de deux heures. De fait, l’approche scénaristique est étonnamment mécanique, pensée de façon pratique plutôt qu’artistique. Narrativement, l’objectif du film n’est à aucun moment de créer quelque chose de nouveau, de marquant ou d’original, mais bel et bien de conduire le spectateur d’un point A (l’univers Marvel sans les Gardiens) à un point B (l’univers Marvel avec les Gardiens). Et idéalement, de rendre la route la plus agréable possible. Et pour ce faire, la brochette de brutes tarées composant ces fameux Gardiens se révèle être sans trop de doutes la meilleure équipe de compagnons de voyage qu’ait pu connaitre un blockbuster depuis pas mal d’années.



A la tête de cette équipe, Peter Quill, autoproclamé « Star Lord » (Joué par Andy Dwyer. Enfin Chris Pratt, quoi). Pirate, voleur, quelque part entre Han Solo et Indiana Jones en moins harrisonfordesque. A ses côtés, l’assassin Gamora (Zoe « je suis condamnée à jouer des love-interests extra-terrestres » Saldana), le raton -laveur mutant Rocket (Bradley Cooper, hilarant), l’arbre humain Groot (Vin Diesel, méconnaissable) et le vétéran endeuillé Drax (Dave Bautista, étonnamment mémorable). Ensemble, ils devront surmonter leurs différences pour vaincre Ronan, le bad guy fade de vigueur dans les Marvel, cherchant à détruire une planète grâce à l’Orbe – un objet ancien, volé par Quill et à la valeur inestimable. En terme d’intrigue, on a vu mieux. L’histoire des Gardiens sert essentiellement à ouvrir une nouvelle page au reste de la franchise globale, grâce à un callback rapide à Avengers et Thor : The Dark World reposant sur l’inclusion du Tesseract et de l’Aether lors d’une scène clef du film, expliquant les origines de l’Orbe et des Infinity Gems. Ainsi qu’à l’introduction officielle, très attendue, du personnage de Thanos (DUN DUN DUN).



Mais l’intérêt clair du film – essentiellement du travail de Gunn – réside dans l’exploitation des personnages et de l’univers. Visuellement, Les Gardiens de la Galaxie est sans doutes la plus grande réussite de Marvel à date – splendides CGI, paysages époustouflants, vision esthétique rappelant une version aujourd’hui oubliée d’une S-F onirique, volontairement fantastique. Une vision aujourd’hui rare, à l’heure où le trop sérieux a envahi les genres les plus absurdes du cinéma. Quand aux personnages, le travail d’écriture leur permet d’obtenir chacun une voix, une personnalité et un objectif propre – réussite notable pour des apparitions aussi limitées, et que l’on a forcément hâte de revoir. Leurs interactions, teintées de références pop-culturelles et de joyeux instants grivois, sont la principale force du film. Le résultat se positionne à proximité des grands moments de la science-fiction mainstream, plus associable à un space opera qu’à un réel film de super-héros. Plutôt qu’essayer d’apporter quelque chose de nouveau au genre, Gunn tente de saluer les classiques en tirant le meilleur parti des possibilités techniques actuelles. A ce niveau là, la réussite est totale.



Verdict : malgré un scénario sans grande originalité, Les Gardiens de la Galaxie tire profit de la folie de son concept, de la vision de son réalisateur et de la performance de son casting pour se présenter le film le plus intéressant sortie des écuries Marvel depuis leurs créations. Spectaculaire, fun et réjouissant, GotG réunit tous les ingrédients des blockbusters à l’ancienne pour offrir au public un divertissement de haute facture.
Warden
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le 11 août 2014

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