Quelques années avant Le Parrain (1972), F.F. Coppola réalisa son quatrième long-métrage sur une femme au foyer qui lorsqu'elle découvre qu'elle est enceinte ressent le besoin de s'évader de sa vie et de son mariage. Ce film c'était Les gens de la pluie.


Dès le premier plan, j'ai été charmée. Charmée par ce côté intimiste, par la couleur et le grain de la pellicule, par les dialogues, par les costumes, par Shirley Knight.


Il s'agit d'un road movie (un de mes genres favoris), d'un voyage donc, effectué par cette femme perdue qui va prendre en stop un homme, plus jeune et attirant, néanmoins victime d'un traumatisme l'ayant rendu attardé mental.


Elle qui voulait fuir ses responsabilités en quittant son mari se retrouve alors à prendre en charge un inconnu pour qui elle se prend d'affection.


L'Amérique que dépeint Coppola n'est point glorieuse. En effet, sur leur route, la paire improbable va croiser d'autres personnes tout aussi désespérées et confuses.


Le rythme est lent et peut même paraître un peu redondant par un certain piétinement, des allers-retours, des indécisions et pourtant, l'exploration du cinéaste dans ces eaux troubles est prenante.


La ballade est profondément mélancolique. Elle nous porte, nous délaisse, nous rattrape. On se surprend à divaguer parfois et à revenir plus attentifs qu'avant.


Ainsi on est marqués par certaines scènes, par les flashbacks par exemple qui sont comme des piqures de rappel d'un passé qui est encore proche ou notamment par cette séquence dans l'hôtel où Natalie joue à « Jacques a dit » avec Killer.


Ce moment du film en particulier m'est resté en tête pour son découpage et cette idée sublime de plan-séquence vue dans un triple miroir. En termes de ressenti, on est à la fois gênés et fascinés par cette danse entre les deux personnages qui font connaissance en jouant au chat et à la souris.


Les gens de la pluie est une oeuvre symbole d'un mal-être, celui d'une génération d'Américains, femmes comme hommes, qui n'arrivent pas à trouver leur voie, se trouver eux-mêmes. (Rappelons que la même année sortira notamment Easy Rider de Dennis Hopper, un autre roadtrip, annonciateur du Nouvel Hollywood).


C'est poignant, à mi-chemin entre l'introspection et l'incertitude, c'est à voir, tout simplement.

SybilleGuerriero
7

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Créée

le 8 sept. 2020

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