Les Indestructibles
7.1
Les Indestructibles

Long-métrage d'animation de Brad Bird (2004)

Cape au vent et slip moulant, force colossale, flammes au bout des doigts, invisibilité et vision laser, vitesse supersonique, super-gadgets, super-costumes... Et si les super-héros vivaient parmi nous?
Que se passerait-il s'ils devaient rendre des comptes pour les vitres fracassées, les chaussées défoncées et les malfaiteurs évadés? Que deviendraient les super-héros si le monde ne voulait plus de leurs super-pouvoirs?


Quand Brad Bird débarque chez Pixar à la demande de son ami John Lasseter alors directeur artistique du studio, c'est sans cape bien sûr mais cap'. Cap' de tenter une nouvelle expérience avec une technique d'animation qu'il connait peu mais avec une idée de longue date: une histoire de super-héros. A Pixar de se prêter à son tour au jeu. Cap' ou pas cap' de donner vie à des personnages de chair et de sang, des héros humains?
Ce n'est pas un hasard si les protagonistes choisis pour le premier grand galop d'essai du studio furent des jouets. Animer des êtres humais en en trois dimensions pose nombre difficultés. Comment restituer cette transparence si particulière de l'épiderme, le jeu des muscles sous les combinaisons moulantes, le mouvement du tissu qui se froisse, la légèreté d'une mèche de cheveux... Mais en dix ans les animateurs ont eu le temps de se perfectionner et développer techniques et solutions pour affiner leurs effets, peaufiner détails et textures. Et on ne peut qu'être admiratif devant le résultat tout à fait époustouflant pour l'époque... et qui ne démérite pas aujourd'hui face à certaines créations plus récentes.
Pixar relève donc le défi avec brio et nous en met plein la vue. L'univers des Indestructibles a un charme rétro-futuriste et une atmosphère qui rappelle les comics mâtinée de film d'espionnage et soutenue par les cuivres entraînants de Michael Giacchino. Environnement urbain sillonné d'un monorail et dominé par des grattes-ciel élancés, petit pavillon de banlieue (trop) tranquille, île volcanique, jungle luxuriante... Le studio se surpasse et ses animateurs nous offrent des scènes d'action endiablées et fluides, des séquences chargées d'émotions ou de traits comiques, glissant de l'une à l'autre avec beaucoup de finesse.


Pour autant Brad Bird ne cherche pas un rendu parfaitement réaliste. Ses personnages tiennent de la caricature, avec des traits forts et affirmés: un parfait équilibre entre réalisme et dessin-animé pétulant.
Et le film ne serait rien sans eux, les personnages. Le quintet Parr, alias les Indestructibles est sans doute l'une des familles les plus attachantes du cinéma. Car si Bird rêvait de super-héros animés, il voulait surtout et avant tout faire un film centré sur la famille et la difficulté pour chacun de ses membres d'y trouver sa place - une thématique qu'il poursuivra plus tard dans la suite dans leurs aventures. Il rend l'ordinaire et l'extraordinaire plus complémentaires que jamais et dote ses personnages de pouvoirs à leur image. Ainsi l'adolescente complexée s'efface, disparaît et s'isole du monde grâce à ses champs de force ; la boule de nerfs qu'est le cadet court plus vite que son ombre et ne trouve pas dans la routine de sa vie scolaire d'exutoire satisfaisant à son trop plein d'énergie ; le patriarche, l'ego chevillé à son image d'homme indestructible, a du mal à mettre son super-costume au placard et, la quarantaine guettant, regrette sa gloire passée et ses muscles d'acier...
C'est que la vie civile, celle de tous les jours, ne semble pas faite pour les satisfaire, et certainement pas Mr Indestructible. Tout est trop petit pour son immense et encombrante carcasse, trop fragile pour ses grosses pattes... L'occasion de reprendre du service même en douce est trop belle pour qu'il hésite longtemps à s'envoler ver le soleil des tropiques et les projets d'armement top-secret. Mais l'indestructible et fougueux super-héros fonce bien sûr tête baissée dans un guet-apens. Heureusement Mme Indestructible ne manque pas de fougue elle non plus! Et avec la complicité de la plus truculente des modistes elle enfile à son tour masque et collants, prouvant qu'une mère au foyer peut aussi être une super-héroïne, et avec un gamin dans chaque bras s'il le faut.
Et c'est en faisant front ensemble que chacun trouve sa place et se révèle.


L'aventure super-héroïque se mue en épopée familiale, et c'est un régal. Brad Bird, qui décidément mériterait une cape de super-héros, jongle parfaitement entre les deux dimensions de son scénario en le entremêlant avec habilité pour aboutir à une aventure passionnant riche en péripéties et une histoire drôle et touchante.
Mais il n'a pas dit son dernier mot pour autant, et les Indestructibles non plus. De nouvelles péripéties familiales et super-héroïques les attendent... Et quatorze ans plus tard les retrouvailles sont à la hauteur, ce qui n'est pas peu dire!
Sans cape, mais plus cap' que jamais!

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le 19 juil. 2018

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Cocolicot

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