De toutes les idées qui m'ont traversé l'esprit durant ce film, je suis fier de mon choix de titre ^^
Si je trouve que l'idée principale du film arrive un peu comme un cheveu sur la soupe "Et si on allait à Paris ? :D" - L'impulsivité chronique quoi - je dois reconnaître que le film pose de vraies questions. Il remet en question le rêve américain. On a en plus un débat d'idées avec l'opposition des conjoints.
"Je me tue au boulot, je fais des efforts quotidiens."
"Ca demande plus d'efforts encore de faire ce qu'on choisit de faire."
L'un prévoit l'avenir, l'autre veut vivre sa vie à fond.
L'un quitte, l'autre double.
Vivre de façon égoïste ou vivre en société. Car oui, posé comme ça, la neutralité dont je faisais preuve jusque là s'évanouit. Et je vais me permettre une dimension politique à cette critique.
La génération mai 68 s'est opposée à celle de ses parents sur ce point philosophique. Avoir le droit de faire ce qu'on veut. "Je fais ce que je veux avec mes cheveux." On veut plus de liberté, moins de contrôle, on dénigre l'autorité et les institutions publiques. C'est le libéralisme :) On ouvre les frontières, on est citoyen du monde, on vit en voyageant (petit retour subtil au film), on mange du soja.
Des Macdo partout et la délocalisation de toutes les usines /o/
Sur Facebook, on voit de plus en plus d'images qui tournent et soutiennent le camp de ceux qui vivent leur vie à fond. On dénigre le travail, les courts métrages pullulent sur ce même thème : l'insignifiance désespérante du monde social : les réseaux sociaux sont mauvais pour nous, la ville, les maisons, tout ce qu'a construit l'homme est mauvais. Nous devrions retourner vivre comme des animaux en pleine nature ?
Cette mentalité se répand comme une traînée de poudre, et on devrait bien faire attention. Car si la génération mai 68 est aujourd'hui la génération Apple, elle n'a jamais vraiment été politisée (voir Le péril jeune). Parce que pour cela, il faut faire des études (je salue tous les autodidactes, et vous considère aussi comme des étudiants), mais mai 68 c'est surtout des grèves et manifestations. La génération précédente, qui a vécu la guerre, eux avaient les vraies valeurs traditionnelles, et savaient pourquoi il faut construire et non détruire. Robinson Crusoe sur son île déserte n'a jamais dit "Chouette, je vais pouvoir vivre comme un animal", il a fait tout ce qu'il a pu pour retrouver un semblant de société, sinon ça aurait été le chaos.
Bien sûr il y a évolution et progressisme. L'évolution est essentielle, la technique doit progresser, mais elle ne peut pas progresser trop vite, car il lui faut un temps d'adaptation, sinon on n'a aucune évolution, mais on ne fait que remplacer un objet par un autre. Cela vaut aussi pour l'évolution des espèces : un même individu n'a pas donné naissance à un poisson, un lézard et une vache ^^ Bref tout ça pour dire que je me méfie du progressisme, je me méfie des idées qu'on retrouve partout dès qu'on ouvre Facebook ou qu'on regarde un film américain. Et je suis ravi de voir un film qui discute cette question.
Après, je trouve que la question est évoquée sans les enfants. C'est vrai que dans les années 50, les enfants n'étaient rien d'autre que des meubles, mais si ma mère me dit qu'on déménage à l'autre bout du monde et qu'ensuite elle annule, je lui en veux pour très longtemps. Ici, on se concentre sur la relation des parents, qui est formidablement traitée, mais c'est un peu incomplet.
De manière générale, si la photographie est magnifique, les acteurs vraiment super (surtout Kate Winslet), privé des dialogues, ce film est vide. Il manque de vie, il manque de mouvement. Ce film est une pièce de théâtre, un long dialogue entre les protagonistes, ponctué de quelques rares apparitions secondaires. Et c'est là tout le problème, qu'est-ce que c'est que ce quartier résidentiel si tranquille, cette entreprise tranquille, ces enfants absents, ces parents morts, ces voisins ou collègues adjuvants, il n'y a pas de figurants, il n'y a pas de chaos, tout est parfait, c'est un grand défaut en terme de cinéma. Même l'hôpital est vide... dommage.