À sa première scène, on peut sentir tout de suite si un film est intelligent ou non. Pour Lulu femme nue par exemple, on voit une femme se refaire une beauté aux toilettes. Seulement, elle s’est trompée en allant chez les hommes. Le symbole est là : Lulu est une femme qui n’a pas encore trouvé sa place dans une société qui ne fait pas attention à elle. Elle va le comprendre inconsciemment en partant quelques jours sans avertir ses proches.

On sent en ce moment dans le cinéma français un mouvement féministe bienvenu. Frais car non moralisateurs, ces élans cinématographiques prouvent que la femme a encore beaucoup de choses à dire dans une société souffrant encore d’inégalités sociales devant le sexe. Elle s’en va montrait déjà Catherine Deneuve prenant la fuite pour pouvoir mieux se reconstruire. Au contraire, La Vie domestique emprisonnait Emmanuelle Devos dans un quartier résidentiel ressemblant à une prison.

Lulu femme nue cherche avant tout l’humanisme, à travers le caractère simple et bienveillant de cette femme ne cherchant qu’une chose, le changement. Mais aussi à travers les rencontres qu’elle fait durant ce périple improvisé. Ces rendez-vous du destin peuvent être comique (Demolon et Rebbot se révèlent être un duo tordant), émouvant (Gensac, parfaite de sensibilité en vieillarde solitaire) ou révélateur (Lanners, prouvant que la finesse fait partie de sa palette d’acteur). Voilà ce que le cinéma français sait faire de mieux : proposer un récit simple tout en évitant les caricatures.

Cette œuvre vise également le vrai, et Karin Viard entraîne admirablement bien ce film vers le terrain difficile du réalisme. Abandonnant son charisme de femme assumée et provocante, elle retrouve sa formidable innocence et une naïveté qu’on pouvait trouver dans ses anciennes performances telles que Le rôle de sa vie. Peu à peu, on sent cette Lulu retrouver une confiance en elle dont elle avait tant besoin. « L’enfer, c’est les autres » affirmait Sartre. Ici au contraire, autrui sert à reconstruire une personne cassée.
Hugo_Harnois_Kr
7
Écrit par

Créée

le 10 févr. 2014

Critique lue 272 fois

1 j'aime

Hugo Harnois

Écrit par

Critique lue 272 fois

1

D'autres avis sur Lulu femme nue

Lulu femme nue
BrunePlatine
7

Elle, par bonheur et toujours nue

[Titre qui n'a pas grand chose à voir avec le film - si ce n'est une certaine proximité lexicale - mais qui se veut un petit hommage au grand Guy Goffette qui publie ce jour une nouvelle beauté...

le 2 juin 2016

17 j'aime

Lulu femme nue
matvano
8

Lulu, une femme qui renaît à la vie

Bande dessinée et cinéma continuent à faire bon ménage. Après le succès des films "La vie d’Adèle" et "Quai d’Orsay", tous deux inspirés d’une BD, voici l’adaptation sur grand écran de "Lulu femme...

le 25 janv. 2014

14 j'aime

Lulu femme nue
eloch
7

" comment ça s'appelle ça déjà le, le ? - le bonheur "

C'est quand elle retire (avant un moment de bonheur non feint) et perd son alliance que Lulu redevient entière. Elle cesse de n'être que la femme de son mari ou la mère de ses enfants pour...

le 26 janv. 2014

14 j'aime

13

Du même critique

Citizenfour
Hugo_Harnois_Kr
4

Critique de Citizenfour par Hugo Harnois

Wim Wenders peut aller se rhabiller avec Le sel de la terre. Vivian Maier n’aura pas eu la chance d’être récompensée pour son brillant travail de photographe à titre posthume. Aux dernières...

le 17 mars 2015

17 j'aime

2

Didier
Hugo_Harnois_Kr
8

Critique de Didier par Hugo Harnois

Qui a dit que l'Académie du cinéma ne récompensait pas la comédie lors des Cérémonies des Césars ? Alain Chabat fait mentir tout le monde en obtenant, pour son premier film, ce prix convoité par...

le 9 févr. 2014

17 j'aime