« Ma nuit chez Maud », troisième segment des contes immoraux filmés par Eric Rohmer s’inscrit parmi les fleurons de la Nouvelle Vague. Le cinéma de Rohmer est bavard et celui-ci ne fait pas exception à la règle, nous emmenant volontiers, au gré des rencontres de réflexions sur la religion à d’autres sur la philosophie, en passant par les…mathématiques ! L’introduction est abrupte, nous immisçant en pleine messe pour y écouter un authentique prêche. Et là comme dans toutes les scènes de rue ou de foule, Nouvelle Vague oblige, pas de studio, un ton proche du documentaire, et une caméra embarquée dans un Clermont-Ferrand enneigé ( la photographie noir et blanc est signée du grand chef-opérateur Nestor Almendros)
Les dialogues qui suivent lors des retrouvailles de vieux amis frisent le scolaire, nous laissant l’impression d’un condensé de cours de philo.
Ces premières minutes apparaissent cependant vite essentielles dans l’appréhension du personnage joué par Trintignant, prisonnier de ses principes moraux ou de ses idéaux religieux et qu’une femme divorcée, libérée, intelligente et belle à tomber va faire voler en éclats au cours d’une nuit. Dans ce rôle d’une modernité faisant écho aujourd’hui, Françoise Fabian apparaît lumineuse et sensuelle mais aussi plus fragile qu’elle n’y paraît.
La grande réussite du film est de finir par rendre captivante et attachante une histoire platonique et suggérée, imprimant la marque de fabrique d’un cinéma de badinage intellectuel ou littéraire (même si ici, le ton est plus grave que dans le reste de son œuvre) qu’on finira par qualifier de … rohmérien.
A noter la présence de la toute jeune (et jolie) Marie-Christine Barrault que j’avais l’impression d’avoir toujours aperçue au cinéma relativement âgée …