Avec en guise de promotion des bandes-annonces se classant d’ors et déjà au sein du panthéon des meilleurs trailers de films jamais montés, on peut dire que Mad Max : Fury Road était rapidement passé du statut de projet casse-gueule conspué par les fans de la trilogie originale – surtout après l’annonce du remplacement de Mel Gibson – à celui de l’un des films les plus attendus de 2015 – et c’est peu dire qu’en 2015, il y en a un paquet de films attendus. Après des années d’attente, des critiques presse dithyrambiques et une présentation événementielle sur La Croisette, le nouveau-né du mastermind George Miller sort (enfin) sur nos écrans.


Ce qui fait dès le départ très plaisir dans le développement – et par conséquent dans la forme – de Mad Max : Fury Road, ce sont ses effets spéciaux. Oui, en 2015, il est encore possible de faire un film à grand spectacle autrement que sur fond vert. Ce parti-pris technique se ressent autant dans la texture de l’image que dans le look délicieusement rétro des scènes de courses-poursuites qui ne manqueront pas de faire hausser les sourcils de quelques spectateurs n’étant plus habitués aux vrais décors, aux vrais costumes, et aux vrais acteurs. Oui, Fury Road c’est sale, rude, brutal et d’un mauvais goût assumé, faisant indubitablement figure d’exception entre un ou deux Marvel calibrés et un pénible film catastrophe avec Dwayne Johnson. C’est donc une expérience cinématographique plutôt singulière : une direction artistique à couper le souffle qui, au-delà d’une inventivité visuelle impressionnante, propose un travail dantesque sur les costumes et les décors. Miller oublie le penchant péplum de Beyond Thunderdome et retrouve avec Fury Road ce côté western qui faisait tout le charme des deux premiers volets, avec ces têtes qui feraient de très mauvais porte-bonheurs, ce jeu de regards leonien et cette générosité visuelle qui rappelle fortement la scène finale de Mad Max 2 – en mieux encore. Pourtant, en dehors d’une réutilisation amusante de Hugh Keays-Byrne, Miller ne fait pas dans le fan-service : Fury Road est un préquel, mais il est aussi une réinvention complète de la saga.
Le nouveau casting est très solide. Si Tom Hardy fait rapidement oublier Mel Gibson, c’est Charlize Theron qui impressionne. Elle vole la vedette à Max, l’intérêt de son personnage se retrouvant dans une caractéristique surprenante mais non moins bienvenue du film : Fury Road est, aussi incroyable que cela puisse paraître, un film féministe. Pas une critique misandre et moralisatrice, non, mais un action movie brûlant proposant sous la forme d’une métaphore à peine camouflée une représentation de la libération sexuelle par le biais de protagonistes féminins charismatiques, engageants et surtout s’inscrivant merveilleusement dans l’univers de Mad Max.


Les scènes plus monumentales les unes que les autres s’enchaînent, filmées par un Miller qui sait comment cadrer – contrairement à une grande partie de la concurrence actuelle. L’action est fluide, entraînante et surtout, malgré sa débauche, elle n’ennuie jamais. Une légère migraine pourrait finir par se faire sentir à force que la 3D envoie constamment volants, explosions et carcasses à la tête du spectateur, mais ce n’est clairement pas là qu’il faut aller chercher les quelques défauts de Fury Road, dont l’écriture très faible est la faille la plus évidente. Malgré des personnages dont la forte présence à l’écran n’est plus à prouver, les dialogues et enjeux laissent effectivement fortement à désirer : une implication autre que sensorielle globalement assez faible, des punchlines très prévisibles mais surtout une intrigue qui tient sur un timbre-poste. Certes, ce n’est pas ce qu’on attendait nécessairement du film, mais on sent bien que le scénario est loin d’être totalement abouti, seul le personnage de Nicholas Hoult semblant bénéficier d’un traitement intéressant dans la base dialoguée du récit.


Reste que Fury Road est sans doute le film le plus grandiose de la saga, une folie formelle de tous les instants, une proposition de cinéma d’envergure budgétaire maîtrisée de bout en bout, loin d’être une révolution, loin d’être le post-apo ultime annoncé par certains, mais dont la générosité arrogante de spectacle saisissant remet immédiatement les pendules à l’heure par rapport à la concurrence, faisant passer les derniers Fast & Furious pour des circuits Hot Wheels et les Avengers pour une bande-annonce Ubisoft. Titanesque.

Vivienn
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le 14 mai 2015

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