Il aura fallu dix ans de gestation et d’élucubrations pour voir Georges Miller accoucher d’un quatrième Mad Max. Les deux premiers épisodes sont entrés au panthéon du cinéma, créant un imaginaire devenu un genre à part entière qui a notamment fait trace dans le monde des jeux vidéo à travers la saga Fallout. Souvent inspiré, jamais égalé, le mythe du guerrier solitaire dans un monde post-apocalyptique est une référence qu’il était temps de remettre au gout du jour après 34 ans d’absence (le Dôme du Tonnerre étant à oublier). Bien heureux de constater que Fury Road est la preuve implacable que le génie créateur de Miller ne s’est pas perdu dans la Désolation.


Les années ont passées après l’apocalypse nucléaire et le reste de la civilisation s’estompe dans les méandres de la bestialité dans laquelle les croyances tribales rendent les âmes désœuvrées. Lorsqu’il s’agit de récupérer une précieuse marchandise, c’est avec un entrain dantesque que les sbires illuminés d’Immortan Joe, un gourou immonde, se lancent à la poursuite du camion où Max s’est installé.


Incroyable vision du chaos, Mad Max : Fury Road explose les compteurs par sa frénésie totale et relègue les récents blockbusters qui tâchent au rang des pitreries sans saveurs. Rebooté pour répondre aux standards actuels, il garde cependant tout l’imaginaire qui faisait la force des premiers films… à la puissance 1000 ! Plus à même d’exprimer ce qu’il avait en tête, la technologie numérique permet à George Miller de rendre son univers incroyablement fascinant ce qui démontre à quel point il a inventé un genre universel et surtout indémodable.


Le film d’action ultime prend forme dès les premières minutes, de manière à ce qu’il soit impossible de décrocher par la suite. Capturé pour servir de donneur sanguin forcé, Max est enchaîné et muselé comme une bête dangereuse. Chaque accessoire qui passe à l’écran semble d’ailleurs avoir été minutieusement choisi, bricolé pour s’approprier l’esthétique d’une sauvagerie jamais vue. Commence alors véritablement le gros du spectacles avec un rythme absolument inimaginable puisque les différentes poursuites sont longues et chargées en détails. Pour réaliser 2h presque non stop d’action, il fallait que chaque scène soit différente pour ne surtout pas lasser. Une tâche considérable qui est réussie puisque chaque mouvement, chaque plan est inédit et indéniablement travaillé. Même les décors se renouvellent et la Désolation prend aussi bien la forme d’un immense désert plat qu’un brouillard nocturne et boueux.


En effet, visuellement, ce Mad Max est une sacrée claque. Les couleurs chatoyantes rendent l’atmosphère brûlante et les paysages impressionnants. Quand une gigantesque tempête de sable engloutit l’immense poursuite motorisée, les éclaires et les tornades qui l’a compose scotchent le spectateur dans son siège. Les monster trucks côtoient les assemblages de plusieurs véhicules dont on reconnais les différents morceaux, les bagnoles hérissées de pics rouillés, les tambours embarqués sur un char où la corne de guerre est remplacée par une guitare électrique enflammée ou encore les perches d’abordages qui sont autant d’éléments bien dingues qui transcendent l’imaginaire steampunk.


A la manière d’un James Bond, le personnage de Mad Max est censé dépasser l’acteur qui le joue. Tom Hardy remplace ainsi Mel Gibson mais il faut bien avouer que cela marche moins bien. Niveau charisme, le bonhomme est carré de la tête aux pieds et peine à accrocher par ses rares répliques, à cause de cette voix énervante dont les bruits de bouche laissent supposer que son micro est collé derrière sa glotte. Les films passent et ce Hardy est encore et toujours loin de me convaincre. Cependant, comme l’univers supplante le héros, cela n’est finalement pas si important d’autant qu’à ses côtés, Charlize Theron lui pique la vedette. Entre féminité et dureté masculine, elle en impose à l’écran de bout en bout. Il faut dire que son look y est aussi pour beaucoup : cheveux très courts et bras amputé, ce qui montre que la sud africaine peut toucher à tous les rôles.


Enfin, sur le plan de la 3D le constat est assez décevant. On finit par s’y habituer mais les maux de cette technologie assombrissent encore trop l’image et déçoit surtout dans la qualité des éléments de décors. Pour autant, pas de conséquence négative sur les scènes d’action car la caméra au poing est définitivement au placard. Les « vrais » ont définitivement compris qu’il fallait arrêter avec les conneries.


Hypnotisant d’intensité, Mad Max 4 est peut être le film d’action le plus ouf de tous les temps. Basé sur une mythologie devenue un genre à part entière, le gardien du temple Georges Miller montre qu’il est bel et bien le patron. Cette allégorie du chaos, teintée de messages sur l’espoir (vain ?) et la dégénérescence globale, prend tout son sens grâce à un affolant soucis du détail qui découle bien évidemment des standards cinématographiques actuels. Sans cesse en mouvement, l’action ne semble s’arrêter que pour faire souffler un spectateur goinfré d’un spectacle cinématographique exceptionnel.


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le 1 juin 2015

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