" Chouette ! Un film coréen hyper stylisé avec un flic ultra-badass qui rêve de devenir une femme ! " Voila ce que je me suis dit en découvrant la BA de Man on high heels il y a plusieurs mois car autant dire que de part le caractère iconoclaste de son pitch, je m'attendais à un nouvel uppercut en provenance de Corée.
Malheureusement, je suis sorti de la projection partagé et un peu déçu : d'abord parce que si sur le plan strictement formel, le film met tranquillement à l'amende 90 % des productions occidentales, la mise en scène de Jin Jang s'avère un cran dessous de celles des Park Chan Wook, Bong Joon-Ho et autres pointures. Ensuite parce que les codes visuels et narratifs qui sont employés sont désormais connu des cinéphiles du monde entier : dès lors, attendez vous à retrouver dans ce film les ruptures de ton caractéristiques du cinoche coréen ainsi que ce penchant pour la violence paroxystique et les règlements de compte sanglants sponsorisés par Bricorama. A ce titre, les scènes d'action sont toujours aussi jouissives mais possèdent un air de déjà vu, notamment l'introduction qui rappelle furieusement celle de Bitter Sweet Life.
De plus, Jin Jang délaisse parfois les talons hauts et leur élégance au profit des gros sabots, notamment lorsqu'il évoque les motivations de son héros atypique à grand renfort de flash-back mélodramatiques baignant dans une lumière solaire saturée qui devient vite agaçante. Par ailleurs, le métrage est parasité par ce côté outrancier caractéristique de beaucoup de productions asiatiques (principalement dans le jeu des acteurs et dans l'écriture des personnages) qui lui confère une dimension plutôt sympa de manga live mais qui ne sied pas toujours aux thématiques traitées (voir entre autre le sous-texte homo-érotique balourd dans le rapport entre le super-flic et les gangsters).
Enfin, les cinq dernières minutes m'ont laissé circonspect, probablement par ce qu'elles jettent le doute sur tout ce qui a précédé et que j'ai une sainte horreur des fins ambiguës (s'agit t-il d'un rêve ?).
Man on high heels ne se hisse donc pas à la hauteur de ses illustres prédécesseurs et ne parvient pas toujours à exploiter pleinement son sujet mais cela en fait-il un mauvais film pour autant ?
Certainement pas, car malgré ses nombreux défauts, l'oeuvre reste attachante parce qu'elle assure le spectacle et qu'elle n'est jamais aussi intéressante que lorsqu'elle se focalise sur la dualité de son héros. Ainsi, le film devient fascinant lorsqu'il met en parallèle la dimension one-man army / badass motherfucker du protagoniste principal, sa sexualité et sensibilité féminine refoulées. Il doit à ce titre énormément à son interprète, le génial Seun-won Cha, qui parvient à capter toutes les nuances d'un rôle complexe. Jing Jang effectue également un travail remarquable en multipliant les points de vue d'autres personnages sur son héros, opérant de cette manière un travail de déconstruction de la figure du dur à cuire au cinéma.
Au final, on se retrouve avec un mélange atypique entre le polar hard-boiled, le drame lacrymal, la comédie de moeurs et le film militant gentiment pro-LGBT. Ce cocktail hybride ne fonctionne pas toujours et ne fera pas date dans la production coréenne mais reste plaisant à regarder pour son acteur principal, pour son ambivalence et ses explosions de violence.