C’est très jeune que j’ai découvert Florence Foster Jenkins lors d’une émission sur France Inter revenant notamment sur le fameux concert du Carnegie Hall. Indépendamment de l’hallucinante fausseté de la voix, ce qui me fascinait alors, c’est qu’elle était présentée comme une femme voulant s’affranchir de la mainmise des hommes sur la société. Hypothèse qui n’a jamais pu trouver de justification réelle toutefois.
C’est l’une des pistes qu’aurait pu imaginer Giannoli en recréant à la française le parcours de cette reine de la nuit de foire. Il a préféré la sagesse et signe un film bien appliqué. Mise en scène bien appliquée donc, mais sans réel enjeu.
Plastiquement, rien à dire, on sent même chez le réalisateur un déterminisme à être le plus crédible possible fournissant à « Marguerite » les plus beaux atours, une magnifique photo, un soin particulier apporté aux costumes, aux décors et divers accessoires. De même, l’illustration musicale est également intéressante, et dense avec de nombreux inserts lyriques. Mais cela ne suffit pas.
A ce niveau de qualité, on aurait pu espérer aller au-delà de la simple anecdote, replaçant Marguerite dans le contexte culturel et social d’alors. Ce que ne manque pas d’effleurer Giannoli, mais d’une manière si confidentielle, que cela en devient étrange. Ses clins d’œil au surréalisme, le gigantesque œil de verre (réplique quasi exacte de celui de Tony Tasset), la présence de Hugo Ball (le poète dadaïste un peu « barré ») au fameux concert, amusent. De même son approche avec cette jeunesse idéaliste toute éprise de liberté et d’anticonformisme à travers le personnage de Lucien Beaumont ou celle plus débauchée (ce sont les années folles !) à l’image de Kyril Von Priest sont attachantes. A peine mieux traité, l’éclosion des courants musicaux novateurs (Poullenc, Milhaud…). Quant à être dans la fiction, c’est ce brouillement artistique qui aurait du rejaillir à travers l’histoire de Marguerite, elle, le symbole d’un monde en déclin en train de disparaître. Le film en aurait été plus original et surtout plus captivant.
Même Catherine Frot semble se freiner. Elle se livre, ou plutôt non, elle livre des petits morceaux de ses rôles précédents, un florilège de tout ce que l’on aime chez elle, guère plus.
« Marguerite » aurait pu être un film lyrique et flamboyant, il n’est au final que gentillet et propret.