En chantier depuis la sortie du film original, passant de mains en mains avec un casting virevoltant, le remake U.S. de Martyrs de Pascal Laugier est forcément une déception. On le savait, la refonte serait moins violente graphiquement que l'éprouvant premier film, les producteurs américains n'aimant guère se fritter avec la MPAA. Confié au scénariste des deux Motel et par la suite de l'acclamé The Revenant et réalisé par les frères Goetz (le sympatoche Scenic Route), Martyrs joue la carte du remake différent, avec une vision très américanisée de la chose, s'appropriant l'idée de base de Laugier pour la détourner à son avantage. Une façon d'éviter le shot-by-shot mais un pari risqué pour quiconque a aimé l'audace du script original.
Commençant de manière quasi-identique, le long-métrage s'éloigne ensuite du matériau d'origine en conservant dans le récit ses deux héroïnes, en transformant l'une d'elles en guerrière badass et en modifiant le but des ravisseurs. Devenu une sorte de rape-and-revenge classique surfant sur une mode faiblarde (on pense au remake de I Spit on Your Grave) teinté de critique racée sur l'extrémisme religieux, Martyrs ne surprend nullement son spectateur, chose qu'avait réussi à tous les niveaux Pascal Laugier. Parfois légèrement gore mais dans l'ensemble sévèrement édulcoré, le film n'est en aucun cas viscéral et n'arrive jamais à nous prendre aux tripes, que ce soit lors de la séquence du home invasion, celle de l'affrontement entre Lucie et la "créature" (d'un ridicule primaire) ou les scènes de tortures.
La faute à un scénario qui veut se différencier du film original mais ne parvient jamais à atteindre son but mais aussi à une mise en scène trop propre ou du moins pas assez poignante. Au revoir l'atmosphère froide et clinique du film de Laugier, l'interprétation déchirante et le suspense constant. Place à une histoire redondante qui peine à nous tenir en haleine et lorgne plus vers le sauvetage sanglant que sur l'horreur psychologique. Gardant en lui quelques qualités louables, ce remake satisfera peut-être certains fans de torture porn soft mais décevra allégrement les encenseurs du chef-d’œuvre couillu qu'a pondu Laugier.