Je suis bouleversé.
Bouleversé par un film, simple, étrange, minuscule, caché dans un coin de la production cinématographique de cette époque. Un film très court mais qui prend le temps. De poser quelques minutes une histoire courte, mais qui dure des années, sur les choses de la vie. Mary et Max ne se connaissent pas, ne se verront jamais vivants, mais pourtant apprennent à se connaître, à s'apprivoiser, à s'aimer par les mots et à devenir amis. Mary est australienne, Max est new-yorkais. Il habitent à des kilomètres loin de l'autre, mais pourtant on dirait qu'il étaient nés pour se rencontrer.
Ce sont deux mise à l'écart, deux solitudes. Deux tâches brunes dans un monde qu'ils ne comprennent pas. Un monde où la tristesse sur eux planent comme un fantôme de pate à modeler.
Ce qui fait que Mary et Max est si beau, c'est qu'il n'est jamais dans l'émotion facile, précisément parce qu'il n'édulcore pas sa tristesse et sa noirceur. La vie est ainsi faite, de tristesses quotidiennes, visages mélancoliques posés sur le rebord d'une fenêtre fermée, d'êtres fantomatiques qui errent autour de nous. Mary et Max ne cesseront jamais d'avoir ce regard triste sur le monde tant que le monde leur fera subir ces épreuves aberrantes que sont celles d'êtres seul et triste, intensément seul, caché dans un coin dans le noir. Mais ils se retrouveront, deviendront amis et tout finira dans une rencontre ambiguë, douce et terrible à la fois.
L'intelligence du film est qu'il noue sans arrêt ses deux axe : celui de la comédie et de la tristesse. Chaque blague, chaque gag, chaque effet comique est à la fois hilarant et bouleversant. Il y a peu de films qui réussissent à nous faire rire et pleurer, pas d'une seconde à l'autre, mais dans le même temps, exactement, comme une concordance folle de deux émotions pas si contradictoires. Mary et Max s'éveillent à ce monde qu'ils trouvent tous les deux illogiques, avec cette même mélancolie, ce même sourire figé, mais leur parcours est drôle, cocasse, léger.
Je terminerai sur quelque chose de personnel, comme ce qu'est le film. Le syndrome d'Asperger est un thème très peu traité au cinéma, voir carrément jamais. Il se trouve que j'ai un très bon ami atteint de ce syndrome qui me confia un jour qu'il aimerait que ce sujet soit traité au cinéma, sans que ce soit un film larmoyant, mais aussi drôle. Je lui parlerai prochainement de Mary et Max parce que c'est un film digne avant tout, il ne rie pas du syndrome d'Asperger, il l'accompagne et raconte simplement des choses de la vie comme elles le sont dans la vie même : tristes, mais aussi tellement drôles, tristes, mais aussi tellement belles. Dans un entre-deux constant où s'en vient nicher, pure et entière, l'émotion d'une amitié naissante. Comme le dit Max à un moment du film dans une lettre à Mary : "ma vie est comme la tienne, c'est une longue route pleine de fissures et de mégots". Mais peut-être qu'au bout de cette route, il y a un petit personnage de pâte à modeler qui sourit et nous attend.
B-Lyndon
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le 3 nov. 2013

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B-Lyndon

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