Bienvenue dans le trash et kitsch d'un film japonais sur le fil du guignol, mais qui s'en sort vraiment très bien ! On est dans un parcours plutôt similaire à celui de Shihiko dans Millenium Actress, l'héroïne s'installe successivement dans une dizaine de vies qui finissent toujours plutôt mal, et rebondissent toujours à la suivante, contre toutes attentes,
ici cela dit on n'explore pas les strates de l'histoire japonaise, mais on s'ancre dans la modernité, on explore les strates sociales,
et si Shihiko bénéficiait d'un angelus gardus ex machina pour la sortir de tous les mauvais pas, Matsuko fait face seule, tout simplement parce qu'elle n'a pas le choix, parce que le corps ne lâche pas, et que l'esprit finit toujours par suivre dans le processus de la survie,


sa plus grande malédiction semble celle d'être très belle, elle donne beaucoup, ne reçoit pas grand-chose, elle rend les hommes fous souvent de ne pas se sentir à la hauteur,
il y a cette phrase qui revient souvent, la valeur d'une vie ne se mesure pas à ce qu'elle a reçu, mais plutôt à ce qu'elle a donné,
quitte à privilégier par dévouement la violence conjugale comme un bonheur qu'elle se choisit...


c'est trash et kitsch, dans cet ordre, parce que si c'est le trash qui frappe et porte l'intrigue, c'est le kitsch qui l'emporte, dans la mise en scène et la fameuse grimace de l'actrice,
celle de l'enfance
n'a rien à envier à celle de l'adulte,
c'est la grimace du dernier recours qu'elle a appris à faire lorsque tout devient rouge,
et qu'elle fait maintenant sans s'en rendre compte dans les pires circonstances,
c'est à l'image du film, le ressort tragico-comique surgit toujours, de manière inventive je trouve chaque fois, quand tout semble désespéré.
on ne s'ennuie jamais, malgré la succession catalogue de chacune de ces existences, de prof à femme de Yakusa, en passant par taularde, coiffeuse et escort girl,


Certains passages sont tout simplement géniaux, d'humour mêlé à la gravité, voir au mysticisme,


Lorsque son mari Yakuza la rejette et s'enfuit, par exemple, pour la protéger de ses comportements colériques, il réalise la vanité de cet abandon, aux pieds du prêtre :


_Dieu est amour, je ne sais pas pourquoi ces mots m'ont conquis. J'ai été incapable de les ignorer.
_Dieu est amour.
_Dites le moi ! Qu'est-ce que ça veut dire ? S'il vous plaît !
_Avez-vous déjà haï quelqu'un de toute votre âme ?... Si c'est le cas, pouvez-vous prier pour eux de toute votre âme ?
_Impossible.
_C'est pas grave. Le cœur des humains est faible. Nous sommes incapables d'aimer nos ennemis. Mais, avec l'aide de Dieu, c'est possible. Dieu pardonne les pêcheurs, et les aime inconditionnellement. Parce que, Dieu est amour.
_Dieu pardonne les pêcheurs... et les aime... inconditionnellement... [flash-back kitsch de la bonté inflexible de Matsuko]... Matsuko... Matsuko était mon Dieu.


Quand le prêtre veut lui parler de l'amour en trois temps qui passe d'abord par le ciel pour redescendre sur terre, il y voit un peu idiot l'amour frontal pour une femme dont il comprend soudainement qu'elle est une déesse. Toutes les émotions se mélangent dans cette bouffée d'amour qui germe en syllogisme.

Vernon79
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le 2 janv. 2019

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Vernon79

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