Duplicity lights
Il faut un certain temps pour mettre le doigt sur l’emprise générée par Midnight Special. Parce qu’il est accidenté, parce qu’il n’est pas exempt de défauts, le trajet qu’il propose nous embarque...
le 17 mars 2016
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J'suis embêté avec Midnight Special. J'ai passé le film à me dire que ça allait devenir une référence en matière de SF subtile et puis, lentement mais surement, l'enthousiasme est retombé. Non pas que j'ai fini la séance spécialement déçu, mais il m'a manqué quelque chose pour pouvoir passer de la curiosité sympathique à la vraie surprise, celle que j'attendais de la part du mec qui m'a tellement fait vibrer avec ses autres films.
Car malgré toutes ses belles qualités, ses acteurs impliqués, un sens de l'image redoutable et des effets spéciaux parfaitement gérés -ce qui est en soi un tour de force, réussir à composer de l'effet visuel crédible sans le pousser dans la démesure étant une rareté qui s'apprécie-, il manque une unité à Midnight Special. Jeff Nichols promet un film flirtant avec le fantastique mais choisit de lui offrir un final sans mystère, un dénouement sur-explicatif qui se finit sur un plan que j'aime qualifier de "petit twist à la M6", comprenez qu'il se passe un truc dans l'image qui appelle une explication saugrenue, un retournement de situation qu'on n'a pas vu venir. Pareil à une main qui surgit d'une tombe fraîchement creusée, aux yeux d'un cadavre tout juste refroidis qui se rouvrent, le père aimant semble avoir hérité d'un peu de pouvoir de son fiston, en témoigne un petit reflet dans ses pupilles assorti d'un effet sonore pour bien l'appuyer...
C'est symptomatique d'une fin qui en fait trop et d'un metteur en scène qui ne s'autorise pas un film homogène en cédant aux sirènes du spectaculaire dans le dernier acte alors qu'il avait pris soin de ne pas les entendre jusque là. Un bâtiment Starkien qui est censé donner la réponse de l'origine de mini cyclope, des personnages faits de pure énergie qui débarquent, une échappée sans encombre d'une salle sécurisée gardée en plein territoire secret défense, un 4/4 qui fait le tour du monde avec des pneus crevés, des choix d'écriture très problématiques pour moi dans le sens où ils remettent en question toute la première partie d'un film qui promettait un traitement beaucoup plus subtile de la fuite d'un petit garçon faussement fragile qui ne peut compter que sur ses parents (enfin, ils lui font principalement des bisous, parce que finalement c'est lui qui fait tout le boulot) pour le soutenir.
Ceci étant dit, on ne pourra pas enlever à Nichols sa force de proposition, ni sa belle implication. Midnight Special est une bobine qui essaye de faire de la résistance à une époque où le film de genre est souvent boudé, mais n'y parvient pas totalement. Difficile de vendre un film de science fiction s'il n'y a pas une bibliothèque en 5 dimensions à la fin pour le rendre légitime. Ici on a le droit à une resucée des bâtiments d'Elysium en guise de cerise sur un gâteau qu'on a recouvert petit à petit de glaçage, jusqu'à trop en mettre.
Damn, Nichols était à deux doigts de signer une surprise de la trempe d'Ex-Machina, il a tout de même réussi à me faire frémir pendant une bonne heure (la chute du satellite sur la station service est un grand moment) et à me faire sourire ensuite. Malgré son corps malade, Midnight Special est un coeur pur, à n'en pas douter.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste L'ours, Homo Video, en 2016
Créée
le 25 sept. 2016
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