Depuis une quinzaine d’années, Mamoru Hosada s’est imposé comme l’un des réalisateurs phares des films d’animation japonais. Des œuvres comme la Traversée du temps ou Le Garçon et la Bête ont affirmé son style, fait d’un mélange entre fantastique et réalité, traversé par des préoccupations actuelles, qui tranchent avec les odes au passé et à la nature du studio Ghibli.


Pour Mirai, ma petite sœur, le talentueux japonais ne sacrifie rien de sa personnalité, mais écrit et met en image une histoire assez intimiste, celle de l’arrivée d’une petite sœur dans la vie de Kun. Il n’est qu’un enfant de quatre ans, aimé par ses parents, un père architecte et une mère manager. L’arrivée d’une nouveau membre va évidemment bouleverser son équilibre, il n’est plus au centre du foyer, le bébé réclame plus d’attentions. Les parents ont décidé que la mère continuerait à aller travailler, tandis que le père le ferait à la maison. Ce n’est évidemment pas si facile, Papa doit apprendre à être un bon père au foyer, Maman le reprend, s’agace parfois et tous deux doivent gérer leurs deux enfants.
Kun a donc beaucoup à apprendre et dépasser ses caprices et ses peurs. Le fantastique de Mamoru Hosada s’introduit dans le récit avec l’arrivée de différents personnages que lui seul voit, le chien devient un homme qui lui aussi regrette d’avoir perdu sa place privilégiée quand est arrivé Kun, sa grande sœur du futur vient lui demander de l’aide, et ainsi de suite. Ces petites aventures avec des personnages qui viennent aider Kun représentent des petites tranches de récits initiatiques, qui vont aider le petit garçon à avancer, et donc à grandir.


Le thème de la famille est donc primordial, se développant dans celui de la construction d’un foyer et de sa place dedans. L’histoire est douce et sensible, mais sans angélisme. Kun est un petit garçon, c’est donc un capricieux, un pleurnichard, un égoïste. Il apprend très lentement de ses erreurs. Le père et la mère sont maladroits, tendres mais parfois trop secs, comme beaucoup de parents. Leurs dernières paroles échangées nous le rappellent bien, ils font ce qu’ils peuvent, du mieux qu’ils peuvent.


Il est donc regrettable de lire certaines critiques bien virulentes, reprochant le caractère enfantin de Kun, d’autres affirmant que le film fait l’éloge de la famille. Mais c’est peut-être aussi parce que le film touche à certaines cordes sensibles, nous faisant revenir sur notre passé ou nous interrogeant sur notre futur. Selon notre passif en tant que frère ou sœur, ou selon nos envies de construire une famille, avec tous les espoirs et les craintes qui vont avec.


Pour illustrer ce récit initiatique, le style choisi ne manque pas de charme. Le trait est léger et gracile pour la représentation des adultes et du décor, il se montre plus déformé pour les attitudes de Kun et toutes les émotions fortes par lesquelles il va passer, et pas forcément les plus dignes. Mais quand l’histoire quitte le foyer familial, pour des envolées plus fantastiques, l’animé se permet une fantaisie tout de même contenue mais qui révèle le passage d’un monde à l’autre, avec une nouvelle inventivité et une mise en scène plus dynamique.


Toutefois, si on doit souligner l’importance de ces passages, leur durée a parfois tendance à prendre le pas sur un aspect qu’on aurait aimé voir développer encore un peu plus, celui de cette vie familiale, certes fragile, mais portée par l’envie des parents de faire au mieux.


Ce petit garçon n’a rien d’extraordinaire, mais ce qu’il vit ne peut que nous toucher, malgré tous ses vilains défauts. Le surnaturel est un support pour apprendre, pour lui mais aussi pour le spectateur, avec une certaine finesse bien appréciable. Mirai, ma petite sœur regorge de sentiments, mais ne recherche pas à en montrer les meilleurs ou les pires, à exposer une vision angélique de la famille ou au contraire une critique noire. Il est optimiste, mais résonne en chacun de nous.

SimplySmackkk
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le 17 avr. 2020

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