Aussi surprenant qu'excellent à mes yeux, Mission: Impossible 3 n'a pourtant pas rencontré le succès promis, compte tenu d'un échec commercial relatif (sauvé par les recettes mondiales) ; lui imputant les récentes frasques de Tom Cruise, la Paramount décida de mettre fin à leur collaboration en congédiant l'iconique acteur, réduit à faire profil bas par la suite.


Cinq années ne furent donc pas de trop pour digérer la rupture, au terme desquelles le studio lui ré-accordera sa confiance à la faveur d'un quatrième M:I, alors pareil à une seconde chance : entre la relance définitive d'une franchise méritant plus, et la résurrection d'un Tom Cruise en territoire connu, ce Ghost Protocol brillait ainsi d'un intérêt double, d'autant que celui-ci marquait l'intronisation d'un nouveau réalisateur.


Exit donc J.J.Abrams, devenu producteur, Brad Bird (Pixar) prenant la direction des opérations dans son premier film en prise de vue réelle, de quoi accroître notre curiosité... s'il est aujourd'hui acquis que M:I Ghost Protocol a réalisé le meilleur score de la saga d'espionnage, mais aussi de Tom Cruise, au box-office, est-il pour autant l'opus référence d'Ethan Hunt et cie. ?


Fort d'un bon accueil critique et d'une rentabilité avérée (là où M:I3 avait été injustement boudé), le long-métrage promettait donc beaucoup, mais s'il demeure bien avec logique le volet le plus populaire d'entre tous (Rogue Nation changera peut-être la donne), Ghost Protocol ne surpasse aucunement l'épisode Abrams : moins incisif que son aîné, le film abandonne cette empreinte sombre au profit d'un contenu plus lisse, pas forcément original car plus formaté, mais parfait dans son optique de divertissement grand spectacle.


À défaut d'être véritablement enthousiasmant, ce cru remplit à la perfection son cahier des charges, comprenant une intrigue rondement menée, un visuel impressionnant (tempête de sable) couplé à un sens de la démesure maîtrisé avec brio (escalade), et enfin une dose d'humour plus prononcée qu'à l'accoutumée (Benji oblige) ; le personnage gagne d'ailleurs en importance (sidekick comique), et si l'on peut regretter le rôle minimal de Luther (Ving Rhames), l'intronisation réussie de nouveaux venus rend compte d'une équipe probablement plus attachante qu'auparavant.


Certes, Jane Carter constitue une figure foutrement classique, tandis que l'on apprécie William Brandt davantage pour sa capacité à ne pas faire (trop) doublon vis-à-vis d'Ethan Hunt (ce que l'on pouvait craindre) que pour le personnage en lui même, mais l'alchimie s'opère facilement, notamment à l'aide d'un casting encore une fois conséquent ; la seule ombre au tableau concerne en fait le grand antagoniste désigné, Kurt Hendricks, cet adversaire somme toute correct dans sa finalité se voulant trop peu fouillé pour accrocher, tandis qu'il souffre naturellement de la comparaison avec le mémorable Owen Davian.


Le fond présente quant à lui quelques petites irrégularités nous empêchant de prendre complètement notre pied : si l'introduction s'avère plutôt captivante, si ce n'est savoureuse ("Allume la mèche"), et que l'on pardonne volontiers le caractère improbable du scénario (ce ne serait pas "impossible" autrement), la trame survitaminée manque finalement de rythme, la faute à une succession de missions (placées sous l'égide d'une poisse constante) instaurant une sensation de redondance ; rien de bien rédhibitoire heureusement, mais le suspense et sa tension attenante finissent par s'en ressentir, bien qu'il faille reconnaître au final un climax jouissif.


Entre légères incohérences (présence surprise de vous-savez-qui à Dubaï) et un fameux Protocole Fantôme manquant le coche (l'impression "seul contre tous" n'est pas assez marquée, on ne se sent pas en danger), M:I4 n'est donc pas aussi emballant qu'espéré, d'autant que le long-métrage en fait un peu trop autour de la relation Hunt/Brandt ; cette dernière et son lot de rebondissements laissent d'ailleurs de marbre, son semblant de dramatisation et autres révélations n'ayant pas vraiment eu l'impact escompté.


Enfin, Brad Bird s'en tire certainement avec les honneurs mais sans pour autant conférer au film une identité visuelle propre : bien que nerveuse, sa mise en scène semble en ce sens plus plate que celle d'Abrams, dont on ne retrouve pas le punch ayant en partie fait le charme de M:I3 ; toutefois, il est à noter que Michael Giacchino, déjà à l'oeuvre sur la BO du précédent volet, se sera en l'espèce surpassé ici... de quoi compenser en partie un pan physique moins novateur (exception faite de nouveaux gadgets sympathiques).


Bref, je pense avoir fait le tour des forces et faiblesses (relatives) de ce Ghost Protocol, qui bien qu'ayant tenu sans ciller ses promesses d'un grand divertissement compilant action, humour et intrigue type espionnage, n'aura aucunement fait mieux que M:I3 ; au delà de leurs différences respectives, ce made-in-Bird n'est certainement pas une déception, mais n'est rien de plus qu'un long-métrage aussi plaisant que ludique, ne se détachant qu'à grand-peine de l'actuelle norme blockbusteresque (pardonnez le barbarisme)... il ne lui aura finalement pas manqué grand chose pour véritablement m'enthousiasmer.

NiERONiMO
7
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le 5 sept. 2015

Critique lue 226 fois

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