Avec pas loin de vingt années de service au compteur, la saga Mission: Impossible sur grand écran semble ne s'être jamais aussi bien portée ; des suites d'un quatrième volet ayant satisfait toutes les parties (bon accueil critique et résultat on ne peut plus probant au box-office), Rogue Nation se présentait donc sous les meilleurs auspices, aussi rien n'aurait su entacher la perspective d'un sommet de divertissement d'action grand public.


Nulle inquiétude au sujet du désistement de Brad Bird (au profit de Tomorrowland) donc, l'éminente figure Pixarienne n'ayant pas non plus accompli de miracle sur Ghost Protocol, alors en deçà de M:I3 (et même M:I tiens, la patte De Palma valant son pesant de cacahuète) ; de plus, coller une nouvelle tête à la réalisation étant l'une des marques de fabrique de la franchise, pas de chamboulement au programme.


Non crédité sur le précédent film, Christopher McQuarrie fait ainsi son entrée en scène, sur une bienvenue suggestion de Tom Cruise ; scénariste de métier, il retrouve ainsi l'acteur après son fort savoureux Jack Reacher, tout en entretenant l'espoir que son ambiance old-school déteigne (ne serait-ce qu'un peu) sur Rogue Nation (qui se pose comme la suite (plus ou moins) directe de son prédécesseur, une première au sein de la saga).


Pour autant, si ressemblance il y a bien, ce cinquième opus se démarque avec la manière : fort d'un judicieux choix de tourner sur pellicule (qui doit-on féliciter pour cela ?), M:I5 couple avec brio mise en scène parfaite, photographie soignée et grand spectacle galvanisant ; dans une même veine, son ambiance se veut délicieuse, dont l'aura légèrement rétro n'est pas sans rappeler l'univers Bondien, ce qui n'est en l'espèce pas désagréable pour un sous.


Faisant l'économie d'effets numériques, Rogue Nation nous en met plein la rétine avec élégance, sans pour autant se départager d'une composante dantesque, la séquence introductive spectaculaire abondant en ce sens ; celle en apnée n'est également pas en reste, tant elle se joue avec aisance de nos nerfs, tandis que l'on réserve sans hésiter la palme à cette mythique course-poursuite sur deux roues, alors à des années-lumière du délire Woo (sérieusement, elle vous scotche au siège la bougresse).


Mené tambour battant, le film nous en donne donc pour notre argent, d'autant que sa trame déroule sans accroc ; en rien révolutionnaire, l'intrigue bien ficelée captive à merveille, à commencer par un grand antagoniste (aux accents bondiens forcément) éclipsant sans difficultés un Hendricks pâlichon... on est toutefois loin du référentiel Owen Davian, d'autant que le Syndicat n'impressionne pas autant qu'escompté.


Certes, cette organisation de l'ombre s'apparente à une meilleure menace que le fantomatique Protocole fantôme (excusez le jeu de mot hasardeux), mais elle aurait gagné à être plus tentaculaire que cela, trop peu de figures d'importance la composant (au demeurant) ; le sixième opus promis changera peut-être cette donne, mais en attendant on se contentera avec plaisir du vilain Solomon Lane (campé par un convaincant Sean Harris), mais surtout de la fameuse Ilsa Faust, au coeur des attentions ici.


Non sans raisons, celle-ci ayant un rôle prépondérant au sein du film, couplé à un portrait savamment brossé... aucun rôle féminin n'avait jusqu'ici brillé à ce point en somme, Ilsa se posant comme une figure essentielle à l'intrigue, tout en affichant une alchimie délectable avec son homologue masculin, l'iconique Ethan Hunt ; ajoutez-y la prestation remarquable de Rebecca Ferguson, dont le regard hypnotique et le charme unique (bouffée de fraîcheur vis-à-vis des standards de beauté actuels), lumineux même, achèvent de vous ensorceler.


De par son implication scénaristique, cette dernière introduit par la même occasion un semblant de réflexion sur la condition des agents doubles, et les immenses contrainte pesant sur leurs épaules ; certes, ce développement reste superficiel, mais Rogue Nation y gagne une certaine profondeur, ne le destinant définitivement plus à l'étiquette "banal blockbuster d'action", dont les précédentes qualités énoncées tendent à me faire dire qu'il s'agit probablement là du meilleur épisode de la saga...


Ce à quoi Benji n'est également pas indifférent, le trublion de service montant en puissance ici : celui-ci, valeur sûre comique de son état, ne se réduit plus en effet au seul rôle de sidekick, le traitement efficace de son amitié avec Ethan accroissant la personnalité du protagoniste... au même titre que notre attachement pour le rôle, aujourd'hui phare, de Simon Pegg, encore et toujours excellent à souhait.


On note aussi la présence plus en retrait de Brandt, un bon choix en l'occurrence de par son association réussie au revenant (si l'on peut dire) Luther, le duo s'avérant suffisamment utile comme plaisant dans sa finalité (quant au nouveau venu Hunley, bien que caricatural, le long-métrage l'use à bon escient) ; il convient enfin de rendre hommage au casting dans son ensemble, M:I ne dérogeant pas à son credo en nous offrant une impressionnante galerie d'interprètes, portée par un Tom Cruise immortel.


Reste une bonne BO de Joe Kraemer (Michael Giacchino domine les débats néanmoins), et un face à face final fort sympathique, faisant fi de toute forme de grandiloquence au profit d'une revanche parfaite, amenant Rogue Nation à se conclure avec élégance ; gommant les défauts de Ghost Protocol, ce cinquième volet des aventures mouvementées d'Ethan Hunt tient donc toutes ses promesses, fort d'un spectacle assurant un divertissement de tout premier ordre... vivement la suite, en espérant que la magnifique Rebecca Ferguson soit encore de la partie.

NiERONiMO
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le 8 sept. 2015

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