Fidèle à ses habitudes, Darren Aronofsky ne ménage pas les spectateurs, les plongeant d’entrée dans une atmosphère étrange avec des plans semblant totalement déconnectés de la réalité et des personnages dont on ne sait rien, ou presque. Refusant l’empathie, le réalisateur américain parvient à générer un sentiment permanent de malaise et d’incertitude, amplifié par des protagonistes jamais fiables, tous autant qu’ils sont. De ce climat pesant va paradoxalement naître une certaine connexion avec le personnage féminin, dont les multiples agressions – tant physiques que psychologiques – vont largement résonner tout au long du film. Un exploit dû autant à la prestation sidérante de Jennifer Lawrence qu’à la mise en scène au plus près de l’actrice. Complètement habitée, la comédienne délivre en effet une performance remarquable de nuance dans la peau de cette jeune femme naïve et sensible. De tous les (gros) plans, elle crève littéralement l’écran, au point de faire de l’ombre au reste du casting, par ailleurs très bon (superbe duo Ed Harris/Michelle Pfeiffer).


Si la première moitié du long-métrage intrigue davantage qu’elle ne captive, la seconde se révèle, quant à elle, incroyable d’intensité, le cinéaste s’autorisant toutes les surenchères possibles pour mettre en image ses nombreuses allégories sur la création ou la destruction. Alors certes, le niveau de subtilité atteint est proche de zéro mais l’expérience de cinéma procurée vaut tout de même sacrément le détour. Pour autant, ce dernier acte absolument hystérique n’éclipse pas les multiples défauts du film. Au-delà du manque évident de finesse dans l’écriture, le récit comprend effectivement beaucoup de thématiques (création, religion, couple, planète…) qui ne forment pas forcément un ensemble très cohérent. Sans compter que certains éléments de l’histoire sont parfois abandonnés en cours de route. En outre, le besoin incessant d’Aronofsky de surligner toutes les symboliques, déjà lourdingues au départ, est extrêmement agaçant. Il en découle du coup une impression mitigée, celle d’un film brillant mais hermétique, audacieux mais grotesque, fiévreux mais assommant.


Porté par des thèmes chers à son réalisateur, Mother ! est donc un thriller horrifique terriblement inégal. Si la prestation sidérante de Jennifer Lawrence, ainsi que le dernier acte du récit complètement hystérique, méritent assurément le coup d’œil, la surenchère symbolique grotesque dans laquelle se complaît le cinéaste est particulièrement irritante. A voir malgré tout !


https://cinerama7art.com/2017/09/14/critique-mother/

Wolvy128
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le 14 sept. 2017

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