En 1978, Werner Herzog revisite "Nosferatu" de F. W. Murnau pour nous déclarer une véritable déclaration d'amour à l'art et au patrimoine allemand, renouant par la même- occasion avec le savoir faire des plus grands artisants. Interprété par Burno Ganz, Isabelle Adjani et Klaus Kinski dont le langage corporelle reste inégalé au cinéma. "Nosferatu" n'est pas moins que l'une des oeuvres les plus effrayantes du cinéma.
Nous y suivons Johnatan Harkern, contraint de quitter sa femme Lucy, pour se rendre en Transylvanie vendre un bien immobilier au conte Dracula.
Herzog y questionne avec intelligence notre rapport au monde, dont la vision de plus en plus cauchemardesque nous retranche dans nos peurs et nos angoisses les plus refoulées. Il nous confronte constamment à ce "Fantôme de la nuit", témoin des térribles troubles de l'humanité, qui nous hante depuis toujours comme le témoignent les peintures de C. D. Friedrich, "Le cri" d'Edvard Munch ou encore "Le cauchemar" de J. H. Füssli qu'il réinvestit avec brio tout au lond de son film. Et ce n'est pas dans la citation mais bien dans la puissance évocatrice de ces images, dont la force iconique a profondément marqué l'imaginaire collectif, qu'il éveille nos sentiments.
Ce "Fantôme de la nuit" est également ce fantôme d'après guerre, connu après la seconde guerre mondiale. L'Allemagne vit son patrimoine bruler vif. Herzog, tout comme Wim Wenders, fait parti de cette génération sans "pères de cinéma". Herzog, à travers ce film, récussite le patrimoine allemand en se réappropriant, et actualisant le propos de Murnau. Si ce dernier montrait un mal pouvant disparaitre en fumé au premler rayon de soleil, Herzog plus nihiliste, présente le mal comme indestructible. En effet même mort le corps subsiste. De plus, Johnatan suite à la morsure du conte, devient lui aussi un vampire et s'enfuit au galop dans un ultime plan. Le mal court toujours. Tout comme le nazisme qui a gangréné le pays.
Par cette introspection du patrimoine, Herzog revient sur le poids de l'héritage et du Fantôme qui le hante. Ses différents niveaux de lecture et ses figures iconiques nous livrent une réflexion universelle sur la condition humaine, ce qui est la quintessence même de la mythologie. En cela l'oeuvre de Werner Herzog s'inscrit instantanément comme une oeuvre majeure.
Frères_Szezur
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le 19 févr. 2015

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