Triple-schizophrénie

"Perfect Blue" est indéniablement un très bon film, un chef-d'oeuvre culte de la japanimation.

La culture japonaise populaire & médiatisée est ici plus qu'exposée : Mima, chanteuse dans un groupe de Jpop, arrête sa carrière musicale à son apogée afin de se consacrer à sa carrière d'actrice en commençant par tourner dans un drama. Seulement, après plusieurs scènes osées, plusieurs personnes, dont Mima elle-même, remettent brutalement en cause le choix de cette dernière.
Véritable déviation psychologique, dans la lignée des animations mind-fuckantes, le film nous emmène d'une part dans les pensées de Mima, mais aussi dans les agissements de ses fans. La réalité est totalement déconstruite, décomposée, pour faire perdurer le doute dans l'esprit du spectateur : qui est Mima ? qui ne l'est pas ? que doit-elle faire & doit-elle se sentir menacée ? Telles sont les questions qui tournoient dans un esprit perturbé par la connivence dont Mima s'inflige elle-même les tourments & l'inquiétude. Suspectée par on ne sait qui, son identité est remise en cause à de multiples reprises. Le spectateur ne sait plus qui croire, comment croire, où mène l'intrigue.
L'enchaînement successif des scènes, cette maîtrise du temps, ce huis-clos lancinant dans la tête de Mima, autant d'éléments qui montrent la suprématie du réalisateur ; car on ne voit pas la réalité comme un personnage extérieur aux scènes devrait la voir : on perçoit les réalités des autres personnages.

Le final, que je n'aurais jamais deviné, surprend agréablement & laisse comprendre l'ensemble du film au spectateur : Mima perturbée par une ancienne "Mima" imaginée ; un fan qui se laisse contrôler par une autre "Mima" ; & cette "Mima"-là, cette femme atteinte de folie aiguë.
Un film explosif, qui sait mener sa propre intrigue, qui hypnotise, qui captive, qui rend fou.

PS : la scène de l'ordinateur m'a fait légèrement sourire ; ou comment constater le vieillissement d'un film.