Permis de tuer... le mythe 007 ? Ce film est un dézinguage systématique de tout ce qui fait l'identité d'un Bond 007 ou même d'un film d'espionnage, ne serait-ce que de par sa violence disproportionnée ou par la symbolique d'un Bond déserteur du MI6. C'est plutôt un film d'action tout ce qu'il y a de banal pour les années 1980, avec un chef de cartel mexicain sadique qui commet une saloperie et la vengeance de Bond, devenu franc-tireur pour l'occasion, qui se déguste froide. Il se situe dans l'héritage de L'Inspecteur Harry et a un ADN commun avec tout ce que les années 1980 comptent comme film de flingue écervelé (avec Stallone, Schwarzy ou Bruce Willis...). C'est d'autant plus absurde que ces films d'actions se sont eux-mêmes beaucoup inspirés de la saga de James Bond. Quand une franchise en est rendue à copier ceux-là même qui l'ont copié, c'est qu'elle a un sérieux problème !


Timothy Dalton parvient néanmoins à être plus en forme que dans Tuer n'est pas jouer, étant ici parfaitement dans son rôle de cynique. La Bond Girl Pam Bouvier (Carey Lowell) est une exception notable dans la série. D'abord parce que c'est la seule Bond Girl à avoir des cheveux plus courts que ceux de Bond, ensuite parce qu'elle est la seule Bond Girl à prendre l'initiative du premier baiser avant ce dialogue mémorable : Bond s'exclamant « vous pourriez au moins attendre qu'on vous le demande » et elle répondant « Alors pourquoi ne le demandez-vous pas ? ». Enfin parce qu'elle sait se battre aussi bien que Jinx (Halle Berry) dans Meurs un autre jour tout en ayant une véritable histoire d'amour avec Bond, alors que les Bond Girls ne sont généralement au mieux que des coups de quelques soirs. La jalousie entre deux Bond Girls, Pam et Lupe Lamora (Talisa Soto) se disputant Bond, est aussi une première dans la saga.


Les seconds rôles ne sont pas beaucoup développés dans ce film. Les sales types ont comme principale qualité d'avoir des sales gueules. Le jeune Benicio del Toro n'a malheureusement pas un rôle assez étoffé pour faire montre de son talent en méchant qu'on lui connaîtra plus tard. Alors qu'on ne verra M qu'un instant (Bond va presque tabasser M pour pouvoir faire cavalier seul et accomplir sa vendetta), Q restera pour soutenir Bond pendant presque la moitié du film. Même si on a toujours du plaisir à voir le quartier-maître et à entendre ses boutades, surtout en la personne de Desmond Llewelyn, on a cette fois l'impression que sa présence durable n'apporte rien de plus au film.


Il y a pas vraiment de destinations exotiques dans cet épisode qui se passe majoritairement en intérieur, la production n'ayant pas un budget très conséquent. On aperçoit toutefois quelques scènes de Floride et de Mexique. Le scénario est inventif dans ses rebondissements, comme dans tous films à suspense mais n'a pas de structure narrative élaborée qu'on pourrait comparer à d'autres Bond. Et puis voir 007 et Sanchez se faire la guerre à coup de bazooka et à grands renforts d'énormes explosions n'est franchement pas des plus subtils, a fortiori pour un (ex-)espion de sa majesté !


Finalement, ce film est passable quand on est amateur de film d'action violent lambda, tartiné d'une fine couche de romance assez réussie. Il est avec raison interdit aux moins de 12 ans pour son étalage de sadisme plutôt dispensable. En regard de la saga toutefois, Permis de tuer n'aurait jamais dû voir le jour.

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le 10 avr. 2015

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