Une histoire de claques

Il y a longtemps que je souhaitais voir "Persepolis". J'en avais vaguement entendu parlé et j'avais du entrapercevoir quelques images, par ci, par là. Préférant les formes classiques d'animation (dessins et décors proches de la réalité), je ne me sentais pas attirée par l'esthétique du film. Pourtant, dès les premières images, j'ai été scotchée. Le noir et blanc pénétrant, l’expressivité des visages, les dialogues instructifs... ont donné à mon expérience un goût incommensurable de nouveau.

En effet, qu'est ce que ça donne de se plonger dans l'histoire via les yeux d'une personne parmi d'autres, vivant sinon subissant une succession d’événement tragiques? ça donne une succession de claques visuelles et sonores sans pareil. D'abord on est Marjane, petite. On pense grandir comme tout le monde, avec des rêves d'enfants plus haut que les étoiles, en l’occurrence, celui de devenir prophète. C'est le début de la révolution, puis de la guerre, puis de l’installation de l'Etat islamique. Entre ce qui a été enseigné à l'école et ce qu'on entend de la bouche des parents, un grand fossé se creuse. Qui a raison? C'est au vu de l'atrocité que la petite Marjane que nous sommes devenus, apprend que la vie peut aussi être désillusion. On est vite rattrappé par une réalité de plus en plus cruelle et de moins en moins sûre pour un cœur d'enfant.

Vient alors la séparation avec ce monde devenu dangereux pour rejoindre une autre réalité : Marjane va vivre en Occident, en Autriche. Dans ce passage, Marjane Satrapi pose réellement le problème de l'identité en situation d'immigration. On est pas toujours à même de comprendre ce que vit le réfugié de guerre ou encore l'étranger débarquant en occident à la recherche d'une vie meilleure. On se rend compte que la politique d'assimilation ou d’intégration n'est pas chose aisée. Quelques facettes de la vie d'immigrés sont plus ou moins passées en revue : la découverte, la volonté d'intégration, le rejet de l'identité, la révolte, la recherche d'une autre réalité, la peur, le manque, la dépression... etc. Autant de sentiments qui peuvent faire passer du rire au larmes pour peu qu'on se reconnaisse dans cette configuration ou qu'on se mette réellement dans la peau de note petite Marjane devenue une jeune femme.

Parce que même avec l'âge, les désillusions restent tenaces. Et Marjane le comprend, après avoir fricoter avec des échecs et laissé des regrets lui prendre un peu de sa vie. Mais cela est une histoire que je ne peux pas raconter en détail au risque de spoiler le film et lui faire perdre son intérêt premier : la découverte.

En somme, l'une de mes plus belles claques depuis longtemps, telle que je la cherchais. Un film d'animation loin de Disney mais non moins méritant. UN conseil : LE VOIR!