Je n'ai appris qu'il y a deux jours en écoutant la radio qu'un nouveau film de Christophe Honoré sortait en salle cette semaine, en même temps que sa présentation au Festival de Cannes. C'est pourtant un cinéaste que j'aime suivre depuis son magnifique film musical Les chansons d'amour, même si je n'ai pas aimé tous ses films. Dans les réussites, j'ai en tête La belle personne, jolie adaptation moderne de La princesse de Clèves. Au rayon des échecs, je me souviens en particulier du catastrophique Non ma fille, tu n'iras pas danser et sa réplique restée culte pour moi sur les endives braisées.
Avant de foncer tête baissée vers ma salle de cinéma préférée, j'ai tout de même pris la peine de regarder le synopsis et celui-ci a confirmé mon envie de voir le film :
- Arthur a vingt ans et il est étudiant à Rennes. Sa vie bascule le jour où il rencontre Jacques, un écrivain qui habite à Paris avec
son jeune fils. Le temps d’un été, Arthur et Jacques vont se plaire et
s’aimer. Mais cet amour, Jacques sait qu’il faut le vivre vite.
Le film débute en réalité en 1993 et nous plonge tout de suite dans l'ambiance des années 90, à grand renfort de plans appuyés sur les téléphones d'époque, sur le lecteur K7, sur le minitel, ou sur les cigarettes fumées au restaurant ou chez le médecin. Ce n'est pas très subtil, mais c'est efficace.
Arthur, interprété par un Vincent Lacoste rayonnant et charmeur, est un étudiant rennais de 21 ans. En couple avec une jeune étudiante, il fréquente pourtant en secret les lieux de drague gay. Grand lecteur auto-proclamé, il ne reconnaît pourtant pas Jacques, un auteur de théâtre et de romans, quand il le rencontre au cinéma. Jacques, interprété par Pierre Deladonchamps que j'ai vu récemment dans la série Trepalium, est trentenaire, homosexuel, séropositif, et père d'un garçon d'une dizaine d'années dont il a la garde partagée avec la mère qui est aussi une amie. L'autre grand nom à l'affiche, c'est l'excellent Denis Podalydès, parfait en vieux pédé, voisin et meilleur ami de Jacques, affublé d'une moustache qui lui fait ressembler à Gérard Jugnot époque Le Père Noël est une ordure ou Pinot simple flic.
Le film est centré sur l'histoire d'amour contrariée entre Arthur et Jacques. Ils se plaisent de façon évidente dès leur première rencontre, mais Jacques ne souhaite par s'investir dans une relation alors que la mort rôde sur lui et emporte ses amis les plus proches.
Ce n'est pas directement un film sur le SIDA. Contrairement à 120 battements par minute avec lequel ce film sera inévitablement comparé et qui montrait à la fois une histoire d'amour entre un séropositif et un séronégatif et la lutte d'Act-Up au coeur des années SIDA, Plaire, aimer et courir vite est d'abord et avant tout une histoire d'amour sur deux personnes qui se rencontrent, se plaisent, s'aiment, mais ont peut-être le malheur de se connaître au mauvais moment. On suit deux garçons, deux hommes, dans leur vie quotidienne, l'un à Rennes, l'autre à Paris, attirés l'un par l'autre mais séparés par l'âge, la distance, et la mort qui plane sur l'un d'eux.
Contrairement à ce que peut laisser penser l'affiche, excessivement aguicheuse à mon goût, c'est un très joli film. Il y a quelques longueurs au milieu du récit, mais il laisse le temps de s'installer et de découvrir les personnages. J'ai même souri plusieurs fois avec des dialogues vraiment drôles. Comme souvent avec Christophe Honoré, les références littéraires et cinématographiques sont omniprésentes, et ont sent que le réalisateur aime écouter ses acteurs déclamer de longues répliques lourdes de sens.
Malgré ces quelques travers, j'ai vraiment passé un très bon moment devant ce film très poétique et touchant. Je vous le conseille si vous voulez assister à une belle histoire d'amour qui sait trouver le juste milieu entre guimauve dégoulinante et mélo larmoyant.