Promare
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Promare

Long-métrage d'animation de Hiroyuki Imaishi (2019)

Si vous avez déjà croisé la route d'un certain "Kill la Kill", vous devez être familier avec le travail de Hiroyuki Imaishi (à qui on doit aussi Gurren Lagann) et en voyant la série susnommée, vous avez kiffé. Ou comme moi, vous avez réagi de la façon suivante : "...???? Hein ???", même en étant adepte d'anime. Du coup, "Promare" n'était pas une expérience des masse tentante pusqu'il semblait dans une veine similaire : des méchas, du fluo et un perso principal qui ne connaît apparemment pas l'usage de la chemise. Et que je ne suis fan ni de kill la kill, ni de gros méchas.


En revanche, j'aime bien le fluo et la SF. Alors Go.



Couvre-feu



Dans un futur-lointain-mais-pas-si-éloigné-clin-d'oeil-clin-d'oeil, l'humanité a pris sacrément cher après que certains humains ont muté pour devenir des "burnish", capable de générer et de manier une sorte de feu interne, qu'ils peuvent même modeler pour former de la matière. S'en est ensuivi un grand incendie qui a rayé de la carte bon nombre de villes, a tué des milliers de personne et a transformé les burnish en ennemis à abattre tout en contraignant la société humaine à se réorganiser autour d'une technologie de pointe capable de lutter contre le feu.
Galo Thymos, jeune pompier plus que volontaire, se heurte rapidement au court de l'exercice de ses fonctions au chef de ces burnish, responsable de dizaines d'incendie depuis des années, ce qui va occasionner baston, scénario, trahisons, "c'est pas ce que tu crois" et autres montagnes russes narratives qui permettront d'éclaircir le pourquoi de l'existence des burnish et de sauver ce qui reste du genre humain.


Sur le plan scénario, "Promare" déroule une recette très classique, surtout pour quiconque habitué aux ficelles des anime, l'histoire se déroule sans surprises mais sans grosse incohérences et sait rythmer ses situations dramatiques et ses combats sans se prendre les pieds dans le tapis. Et ce n'est de toute façon pas le plus intéressant dans "Promare".


Non, les deux intérêts du film sont son animation/design et son lore. Et là-dessus, le film fait totalement le café.



Infarctus daltonien



Bon, disons le tout net : si vous êtes épileptique, que vous ne supportez pas les couleurs flashouilles et la grosse CGI ou que pour vous les combats d'un dragon ball sont déjà compliqués à suivre, vous pouvez arrêter la lecture ici, aller vous faire un petit café et vous mater un truc plus en accord avec vos goûts, qui ne tentera pas de vous brûler la rétine ou de vous faire imploser un synapse. Promare dégueule de couleurs, de mise en scènes over the top à la limite de la parodie de pub de ventes pour mechas avec gros titres intradiégétiques et bastons à la limite de l'ultra bordélique pour en mettre plein les yeux. Le studio Trigger a mis toute la sauce pour que le film vous baffe visuellement et on ne peut pas nier qu'entre le design, l'animation sous amphétamines et l'identité visuelle du tout, Promare fait effet. Personnellement, j'ai fort aimé le design et le côté un peu pété des répliques comme de la mise en scène, un cran au-dessous d'un kill la kill pour laisser un peu moins sur le carreau ceux qui ont du mal à adhérer au délire. Et bordel, que c'est beau, que les combats dépotent, que la CGI est bien gérée. Les mechas empruntent à un peu à tous les design et ont un côté presque "jouets" qui tranche pas mal avec le scénar, finalement plutôt sérieux.



Des allumettes et des hommes



Dans Promare, ça parle de grosse discrimination bien sale, de scientifiques fous, un peu d'écologie, un peu de racisme, le tout emballé dans un mécha jouet kinder plein de couleurs qui bavent. Rien de très violent non plus, ceci dit, le film est pas un pamphlet anti-racisme d'une extrême finesse mais a l'immense qualité de ne choisir l'humour parfois un peu débile - à l'image de son héros - que pour sa forme, jamais pour son fond. Difficile de dire comment un tel grand écart peut fonctionner à l'écran mais le fait est que le studio a su très bien équilibrer les deux pour un résultat agréable à suivre. Mais fluo. Avec des répliques à la limite de l'absurde. Parce que.


Concernant le lore, l'idée de départ - très efficacement campé par une excellente intro - est plutôt simple mais permet au film de dérouler une dystopie colorée et inhabituellement optimiste malgré une situation dramatique, dressée sur quelque chose de forcément plutôt moche. On pourrait reprocher au film une très grande prévisibilité - comme l'identité de son méchant cramée à des milliards de kilomètre à moins que vous ne soyez en état de mort cérébrale ou la "vérité" derrière les burnish - mais ici l'intention n'est pas vraiment au twist et l'univers mis en scène est assez riche et recèle finalement plus de subtilités qu'on pourrait le croire. Le film sait très bien révéler de petits aspects du monde version post incendiaire et accroche le spectateur, en réussissant l'exploit de camper des personnages secondaires ni transparents, ni inutiles, ni horripilants. Chacun a sa personnalité, sa fonction, son charme ( et son goût vestimentaire à faire crever une brigade de la mode d'AVC).


Sans trop spoiler, les deux principaux héros, Galo et Lio, forment un duo qui fonctionne bien, en jouant sur des caractères et des tempéraments aux complets opposés qui parviennent pourtant très rapidement à devenir complémentaires.


Un peu TROP rapidement, en fait.


Et... c'est là que Promare atteint ses limites, malheureusement.



Mais ralentis !!!



Je vais exposer ici une théorie qui n'engage que moi et ne repose que sur mon ressenti suite à plusieurs visionnages.


Promare aurait dû être une série.


Il en a en tout cas toutes les caractéristiques et aurait parfaitement pu se décliner en treize épisodes sans se retrouver dilué ou amoindri : le lore est assez riche pour permettre de remplir les épisodes sans ennuyer, les personnages secondaires ont assez de consistance pour peupler plusieurs heures d'animation et les personnages principaux comme les antagonistes ont suffisamment de potentiel pour tenir le tout sur leur épaules. On a vu des séries bien plus longues avec un contenu et un casting largement plus maigre.


Parce que Promare, avec sa jolie gueule de kinder mécha, son scénario simple - mais émaillé de quelques menues surprises malgré tout - et son lore assez foisonnant, m'a réellement donné l'impression d'être une série.


Bourrée dans 1h40 de métrage.


Et honnêtement, ça se ressent. Si le film prend relativement le temps de bien poser les bases de son univers et de ses personnages dans le premier tiers, le rythme s'accélère au point d'enchaîner si vite les péripéties et les révélations dans le dernier acte que cligner des yeux ou rater un mot revient presque à rater un élément de scénario. Je ne serais pas surpris que plusieurs personnes aient voulu remater ce dernier acte pour simplement bien comprendre ce qui venait de s'y passer.


En outre, je parlais des personnages plutôt réussis : presque aucun n'est vraiment développé, et je ne parle pas uniquement des personnages secondaires. Un des deux héros n'a tout simplement pas de background. Pas le temps. On a moins de deux heures et le monde à sauver. Monde qu'on sauvera en expliquant à peine le pourquoi du comment, en enchaînant les situations au point qu'on finit par voir les grosses ellipses pour gagner du temps ou qu'on se repose sur des facilités - quelle chance, nos héros tombent PILE sur ce qu'il faut alors qu'ils sont dans la merde - qui auraient pu être évitées si le film avait eu le temps d'installer correctement ce qu'il souhaite raconter. Alors, oui, TOUT expliquer n'est pas forcément une bonne chose, oui, conserver des éléments brumeux est une mécanique de narration habituelle dans les manga et les anime et non, cela ne transforme pas Promare en mauvais film, il a suffisamment de qualités solides pour tenir la route malgré ce problème de rythme et de développement.


Mais c'est très frustrant.


Le studio Trigger et le réalisateur ont manifestement le talent nécessaire pour bien raconter Promare. Question de budget ? Sous-estimation de l'ampleur du lore et des personnages ? Aucun moyen de savoir mais le film donne réellement cette impression d'un énorme mécha coincé dans une boîte de mouchoirs sur la fin et de course contre la montre pour réussir à boucler l'histoire à temps. La fin est hyper abrupte, on la croirait issue d'un avant dernier épisode de série (vous savez celui qui précède l'épisode "que sont-ils devenus ?"). Sans compter que sans rien spoiler, le film "ferme" un aspect de son lore, ce qui rendra une suite un peu moins aisée - pas impossible non plus mais pas sans une nouvelle grosse facilité qu'on aurait à nouveau pu éviter.



En conclusion



Promare c'est beau, c'est fun, ça aurait pu être con vu son aspect mais ça ne l'est jamais, ça propose un univers et des personnages intéressants, ça sait tenir en haleine et ça se pique même de quelques mini révélations pas aussi prévisibles qu'on aurait cru. Le studio Trigger aurait pu se limiter à un beau visuel mais a choisi de donner un fond très classique mais intéressant. Cependant, je ne peux pas me départir de l'impression - de plus en plus prononcée au fil du visionnage et renforcée au second - d'avoir regardé un trailer d'1h40 hyper léché pour une série qui promet de tout défoncer. En espérant qu'elle ait vraiment lieu, sinon Promare restera un beau film mais une histoire et des personnages comprimés dans un format beaucoup trop étroit. Pour une œuvre qui parle de feu intérieur ne demandant qu'à brûler intensément, c'est un peu ironique.

SubaruKondo
7
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le 7 mai 2020

Critique lue 166 fois

2 j'aime

SubaruKondo

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