Attention SPOILER


Quoi de plus logique pour rendre hommage à mon film préféré que de lui dresser une humble petite critique ? Une critique… que dis-je, une déclaration d’amour ! Depuis maintenant quelques années que je cherche, aucun long-métrage n’a été aussi bon que Psychose et aucun n’a su le détrôner de son statut de meilleur film de tous les temps, pour ma part. Cependant soyons conscients qu’aucune critique ultra-argumentée ne pourra mieux défendre les arguments cinématographiques de ce film que le film lui-même. Psychose est donc le 47e long métrage du britannique Alfred Hitchcock, inspiré du roman Psycho, de Robert Bloch. Bien sûr on mettra de côté les suites désobligeantes faites en 1983, 1986 et 1990 ainsi que le remake de 1998 de Gus Van Sant, bien que pas désagréable. Les scènes du film constituent aujourd’hui des références pour tous les cinéastes et sont l’objet de nombreuses parodies tellement elles sont devenues cultes. Alors pourquoi Psychose est-il une référence en termes de thrillers psychologiques ? Pourquoi est-il une référence incontournable du cinéma en général ?


Premièrement, la musique, véritable pièce maitresse de la beauté de cette œuvre, est composée par Bernard Herrmann. B.Herrmann, compositeur et chef d’orchestre américain qui composa entres autres les musiques pour les films : Citizen Kane, L’aventure de Mme Muir, Sueurs froides, La mort aux trousses, Les nerfs à vifs, Les Oiseaux et Taxi Driver, rien que ça, s’il vous plait. L’utilisation de cette musique stridente pour la scène de la douche ajoute toute la terreur qui fait de ce film l’un des plus angoissants. Deuxièmement, plus grand sera le méchant et plus grand sera le film. Et ça, Hitchcock l’a compris et utilise l’univers psychologique torturé de son personnage principal pour incarner une terreur qui résonnera longtemps dans nos esprits. Le maître du suspense avait donc choisi pour ce rôle Anthony Perkins, connu auparavant pour Du sang dans le désert avec Henry Fonda. L’instabilité mentale de ce personnage tout au long du film est dérangeante et surprenante d’interprétation. Puis, comment ne pas en arriver à la belle Janet Leigh surtout connue grâce à son rôle dans La soif du mal d’Orson Welles, deux années auparavant. Et c’est d’elle que part l’intrigue. Dès la scène de départ, la caméra intrusive dans la chambre d’hôtel de Marion Crane et de son amant nous pousse au voyeurisme. C’est alors qu’on suit Marion Crane dans sa fuite infernale avec des gros plans majestueux sur cette dernière. L’angoisse monte au fur et à mesure qu’elle s’éloigne de Phoenix et au fur et à mesure de ses rencontres avec un policier et un vendeur de voiture notamment. Les contrastes de rythme marquent les moments de folie du film : quand Marion C. croise son patron en pleine fuite, quand elle rencontre un policier qui semble débarquer de nulle part, pendant la scène de la douche, pour le meurtre du détective Arbogast venu enquêter sur la disparition de la jeune femme en fuite, et enfin pour la scène de fin, véritable twist final au sommet de la tension instaurée par Hitchcock, VERTIGINIEUX !


Focus : Notons ici que la fameuse scène de la douche a nécessitée 7 jours de tournage, soit 70 prises différentes et 62 000$ pour 45 secondes de film ! A l’époque il était inconcevable de faire apparaitre une partie de poitrine dans un film mais le tournage devait se dérouler avec une personne nue car sans cette dernière, il était impossible de savoir quand couper la scène pour ne pas apercevoir une partie du corps du mannequin (engagé à la place de Janet Leigh pour cette partie de la scène). D’où la complexité de la scène liée aux contraintes imposées à A. Hitchcock.


Mais tout ceci ne serait que peu effrayant sans les décors, sans cette sorte de manoir en arrière-plan qui domine la colline derrière le motel. La disposition sous-entend une domination de la mère de Norman Bates sur ce dernier (le manoir domine le motel de Norman). Mais même l’intérieur du motel est troublant avec tous ces animaux empaillés et ce Norman aux habitudes différentes. On notera l’univers sombre des décors avec en plus, l’intérieur inquiétant de la maison et de cette cave intrigante, ce marais abandonné etc… Pour maintenir le suspense à son comble, l’amant et la sœur de la défunte se lancent également à sa poursuite pour au final arriver au sommet du 7e Art avec cette scène de clôture révélant le dédoublement de personnalité du jeune homme gravement malade. La suite est sans intrigue particulière mais toujours aussi folle, Hitchcock nous a préparé une scène de dialogue entre les enquêteurs et le médecin psychanalyste pour nous rationnaliser le tout et nous expliquer le pourquoi du comment, s’en suit le discours de fin de Norman Bates habité par sa mère qui a totalement pris le contrôle de son fils.


Psychose est tout simplement le meilleur thriller psychologique, le meilleur film d’épouvante et plus généralement le meilleur film de tous les temps. C’est l’œuvre révélatrice de l’immensité intemporelle du réalisateur britannique, l’apothéose de son immense filmographie. Outre le fait d’être terrifiant pendant le film, Psychose est un long-métrage qui traumatise son spectateur car le monstre, le meurtrier, le meilleur des méchants du 7e Art est un humain qui a perdu le contrôle, un humain comme tous les autres qui a basculé dans la folie a tout jamais. Un humain en lutte totale avec sa bipolarité, un homme qui n’a pas conscience de sa perte d’identité. Les psychoses sont une tentative douloureuse pour échapper au procès de la culpabilité, elles peuvent intervenir dans chaque esprit en quête d’identité, et c’est cela qui effraie : la démystification d’une maladie mentale pas si rare que ça. Merci Alfred Hitchcock.

Créée

le 9 juin 2015

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The Passenger

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