Il est particulier de chercher à mettre des mots sur un film économe dans les siens, sans doute parce que le sujet traité a quelque chose d'indicible. Et c'est là à mon sens la qualité première de Rabbit Hole, montrer plutôt que dire, offrir un regard plutôt qu'un avis.
Huit mois ont passé depuis la mort de leur tout jeune fils Danny, et Howie et Becca font de leur mieux pour garder collés les morceaux de leur existence brisé, fusse par le ciment des faux-semblants, des faux sourires. Lui s'accroche à chaque fragment de souvenir, elle voudrait quitter cette maison et ce qui se rattache au décès du garçon pour tenter d'aller de l'avant. La grande intelligence du script (que l'on doit à David Lindsay-Abaire, auteur de la pièce originale) étant d'éviter de limiter le traitement du deuil à une simple dichotomie entre ces deux idées, de ne pas imposer l'idée d'une bonne méthode ou ni même de l'existence en soi d'une méthode, d'une façon de faire le deuil. Le déroulement du film tendrait plutôt à montrer qu'il s'agit là d'un processus sans fin, mais qui mute avec le temps, intégrant d'autres variables à la pure douleur.
C'est là que Rabbit Hole monte en puissance, puise son sens et sa beauté : capable de vous prendre à la gorge par de petits riens, il sait aussi faire naître un réel espoir de pas grand chose de plus. Préférant les petites touches à la grandiloquence, le script, qui gère très finement sa temporalité, parvient à mettre du sens dans chaque morceau, chaque scène ayant sa raison d'être, sa résonance. Bien qu'intimiste, collé dans son écriture comme dans sa réalisation à ces deux parents, Rabbit Hole touche à l'universel et s'il ne peut laisser indemne, il propose dans le même temps un début de cicatrisation.
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