Merci aux rageux qui m'ont vendu Brave comme le Pixar de la rupture avec la qualité, conventionnel, banal, creux ou pis. Vous aviez tout faux et êtes laids comme des verrues. Bim-tata-banco.
Brave est d'abord sublissime, rien que pour sa palette de couleurs qui crie : "Viens vivre dans mon film, tu verras comme tout y est beau et merveilleux !" Tout y est en effet plus organique que d'ordinaire. Le bois, la pierre, l'herbe : on veut toucher ! Il devient anecdotique et redondant de louer la qualité de l'animation d'une production Pixar mais on confine encore une fois à la perfection, avec un degré de mignoncité rarement atteint. Comment rester de marbre face à la petite Merida qui gambade dans les hautes herbes ? C'est plus mignon que tous les bébés pandas à 1 million de vues YouTube. Et cette ourse qui fait mine de changer d'attitude par une simple dilatation des pupilles mais qui, tout entière et subtilement, change de façon de se mouvoir, d'être. Quelle leçon.
Mais ce qui fait la puissance de Brave, c'est son discours sur la filiation, sur la transmission des valeurs et traditions. Contrairement à l'ère du temps qui exige que le monde ancien soit balayé, battu par le vent frais de la modernité, de l'émancipation et du libre arbitre coupé des chaînes des racines, Brave trompe son spectateur en faisant mine de focaliser sur la fougue d'une adolescente, littéralement petite princesse, supposément accablée par le poids de son destin. Sa mère, garante de l'autorité et des bonnes manières, est punie pour ses exigences vis-à-vis de sa fille. Elle est enjointe à évoluer, à s'adapter à des mœurs plus libérales. Bien entendu, face aux trois prétendants grotesques présentés à la rouquine, l'adhésion du spectateur se fait sans ambiguïté pour cette dernière. Mais la punition d'un parent, fut-il dans l'erreur relative, ne se fait pas sans dégâts. Des deux femmes liées dans la tourmente et condamnées à trouver un terrain d'entente, c'est clairement la plus jeune qui endure le plus, elle qui reste maîtresse de ses facultés mentales, contrainte de devenir l'inverse de ce qu'elle revendiquait être : une jeune femme protectrice et modératrice de la fureur des hommes. Grandir en urgence pour ne pas perdre sa mère, faite bête privée de voix au chapitre par des velléités d'émancipation juvéniles. Et le génie, c'est évidemment d'avoir rendu la mère déterminante dans le sort de sa fille, flamboyante de colère face à l'insurmontable danger qui menace sa progéniture. L'évolution de chacune se fait par les coups et la douleur mais un pont générationnel est dressé, la compréhension et le respect mutuels sont rétablis. Si l'on est sûr que sa mère la libère de son obligation de mariage, on doute aussi que Merida n'agisse plus que selon son bon vouloir après cette expérience. Pas de prince charmant dans Brave, pas de sorcière maléfique, pas de grande bataille clanique... Un discours simple et puissant sur le dialogue et la responsabilité filiale. Sur la puissance du lien. Et beaucoup d'humour ! Je vous le dis tout de go, j'ai versé ma petite larme.