Après l'immense succès populaire de Bienvenue chez les Ch'tis, Dany Boon, l'homme aux 20 millions de spectateurs, est évidemment attendu au tournant avec cette nouvelle réalisation, et ce, trois ans ans après l'incroyable surprise que fût le deuxième film du jeune cinéaste, encensé par le public autant qu'apprécié par la critique.

L'acteur réalisateur nous revient avec une nouvelle confrontation des cultures, surfant sur le concept de sa précédente réalisation qui opposait les préjugés entre habitants du Nord et du Sud, le cinéaste confronte cette fois ci la Belgique et la France, il transpose son histoire à la frontière franco-belge à la veille du passage à l'Europe et de la disparition des frontières en 1993. Ruben Vandevoorde ( Benoît Poelvoorde ) est douanier Belge et issu d'une famille très francophobe, il hait Mathias Ducatel ( Dany Boon), douanier Français qui sort secrètement avec sa sœur. Afin d'expérimenter la première brigade de douane volante, Ducatel se porte volontaire pour faire équipe avec Vandevoorde, l'objectif : devenir son ami afin de lui faire accepter sa relation avec sa sœur.

Si rien ne semble original au point de penser que Boon se délimite à reprendre les ingrédients qui ont fait son succès précédent ( qui lui reprochera? ), il serait une erreur de condamner aussi rapidement le scénario écrit par le cinéaste lui même. Car Rien à déclarer est plus profond et plus malin qu'il n'y paraît, son histoire, par exemple, s'inscrit dans un fond historique lié à l'avènement de l'espace Schengen, Boon y puise une atmosphère et un contexte dont il traite enjeux et conséquences, tout cela, bien sûr, avec l'humour propre au comédien et basé sur le contraste des personnages, sur l'efficacité de son duo principal, le ridicule des situations et la drôlerie des hyperboles scénaristiques.

Mais là ou le comique frappe fort c'est dans l'utilisation de tous ses personnages, une cohésion d'ensemble flagrante qui donne l'occasion à d'innombrables joutes verbales et dialogues hilarants de s'entremêler dans le plus pur style Boonien, celui ci s'entourant d'ailleurs de ses acteurs fétiches tels que Gamelon, Soualem, Lecluyse, Commandeur, tous déjà aperçus dans ses différentes productions et auquel s'ajoute une troupe d'acteurs Belges pour le moins connus dont François Damiens tient la tête d'affiche. Une efficacité qui doit aussi au large casting présent dont Boon est paradoxalement le moins convainquant, il garde un curieux accent tout le film et offre un jeu qui sonne faux dont le couple qu'il forme avec Julie Bernard ( délicieuse mais limitée ) en est le principale symptôme. Cependant le film se sauve par de croustillants seconds rôles ( François Damiens, Bruno Lochet, Laurent Gamelon notamment ) pour un assortiment d'interprétations globalement réussis dont Poelvoorde reste la principale attraction. Car même s'il apparaît très caricaturale et parfois excessif dans son jeu, rôle oblige, Poelvoorde est, et reste, là raison première au succès de Rien à déclarer, omniprésent et diablement énergique il insuffle au film un dynamisme de circonstance dont Boon et le spectateur se plaisent à devenir les observateurs rigolards et satisfaits.

Au delà de l'arrière plan politique et social, Boon traite comme à sa nouvelle habitude du poids des préjugés et de la haine envers autrui, Kad Merad était résolument plus mesuré et ne faisait preuve que d'ignorances et d'idées reçues dans Bienvenue chez les Ch'tis, alors que Poelvoorde est totalement raciste et borné sur ses attitudes xénophobes et outrancières, prétexte évident aux pitreries irrésistibles de l'acteur à qui Boon donne carte blanche pour notre plus grand plaisir. Il est alors évident qu'au même titre que ce qui a fait le succès des Ch'tis, Boon tombe dans la facilité d'une moralisation utopiste et d'un message au caractère hypocritement naïf, «Le racisme c'est maaaale, aimer l'autre c'est biennnnn » semble-t-on vouloir nous expliquer, on a connu plus fin, même dans l'optimiste comédie française.

Supérieur à Bienvenue chez les Ch'tis, Rien à déclarer se montre plus profond et moins inégal que son prédécesseur, aussi plus drôle il repose essentiellement sur la performance investie d'un Benoît Poelvoorde déchainé qui se permet même de mettre Dany Boon au second plan. Nouvelle comédie efficace donc, drôle et varié sur toute sa durée dont on pourrait reprocher la niaiserie populaire et la morale prévisible, des défauts qui ne voilent pas la sympathie ambiante et inimitable des productions du réalisateur, what else ?
Nicolas_Chausso
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le 7 juin 2013

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