Derrière une grande tendresse qui, certes, émeut lors d’un segment final réussi, Rosalie Blum souffre d’une mécanique des plus conventionnelles et essaie de s’en démarquer par des acrobaties tant dramatiques que relatives à la construction de son récit-choral, sans grand succès. Nous revivons les mêmes scènes plusieurs fois, et ce choix à la Un Jour sans Fin ne repose pas sur le charisme d’un Bill Murray : sous nos yeux prend vie une petite troupe de caractères bien trempés et enlisés dans leur quotidien morne. C’est dire que la fantaisie, et la magie censée découler des interactions, se voient constamment limitées à la réalité, et que les personnages n’apportent nulle folie, nulle fenêtre sur un au-delà du réel, exception faite du cerf-volant à la symbolique pertinente. La structure évoque celle d’un conte moderne, mais au contenu curieusement inerte, comme épuisé d’avance. Certains y liront de la malice, certains seront sensibles à la poésie contenue dans les aléas et les petits mystères. D’autres n’y verront qu’un film de faible envergure qui manque d’audace et de puissance visuelle. En refusant la perversité que son postulat exigeait, en délaissant toute méchanceté, Rosalie Blum se revendique œuvre gentille faite avec les meilleurs intentions du monde. L’âpreté finale sauve le métrage de la sentence bien connue : on ne fait pas de bon cinéma avec de bon sentiment.