Premier film post #metoo « tiré d’une histoire vraie », Scandale ne se démarque pas par sa subtilité mais a le grand mérite d’exposer très clairement, presque pédagogiquement, la culture du harcèlement et de l’intimidation instaurée par les patrons de grands groupes de l’entertainment et l’impunité que leur position leur confère.
Jay Roach raconte la chute du tout puissant président de Fox News, mais on comprend que son idée est de pointer du doigt un mode opératoire qui prévalait (prévaut?) chez tous ces prédateurs surpuissants s’estimant intouchables.
Ce qui est intéressant dans le cas Fox News, c’est qu’il peut aussi évoquer la collusion entre politique et médias, dans la mesure où Scandale couvre la campagne pour l’investiture républicaine qui a vu Trump triompher. C’est assez éloquent sur le climat politique partisan et médiatique aux Etats-Unis, même si cette intrigue se déroule au second plan.
Sa mise en scène vivante et enlevée rappelle son Dalton Trumbo, dans lequel il abordait le Maccarthysme et l’ingérence de la politique sur le cinéma.
Sa réalisation mise sur quelques effets (jeu avec le 4ème mur, voix off, incrustations…) mais les abandonne assez rapidement, vite rattrapée par la densité de son sujet et la nécessité d’aller droit au but.
Le combat est mené par un trio d’actrices parfaites d’investissement. Le charisme de Kidman et Theron, ce qu’elles représentent, sert indéniablement le film. Quand à Margot Robbie, sa sensibilité et sa candeur crèvent l’écran. Elles incarnent avec justesse et nuance ces parcours heurtés, complexes, racontent les doutes premiers sur la légitimité de leur colère puis la nécessaire solidarité entre victimes. Dans la peau du monstre libidineux Roger Aisle, John Lightgow en impose sous son maquillage et domine un casting de rôles secondaires dense et talentueux venu principalement des séries TV (Atypical, AHS, Santa Clarita Diet, Morning Show, Catastrophe, Transparent….) très à propos.
Moins puissant, moins fin que peut l’être la série The Morning Show qui dispose de plus de temps pour creuser les mécanismes de la culture du harcèlement, Scandale pose néanmoins un premier jalon important sur grand écran pour illustrer la libération de la parole des femmes. Avant de voir probablement rapidement débarquer l’affaire Weinstein, qu’on imagine mal être longtemps ignorée par Hollywood…

Créée

le 15 mars 2020

Critique lue 89 fois

Critique lue 89 fois

D'autres avis sur Scandale

Scandale
EricDebarnot
6

La vengeance des blondes ?

"Scandale" n'est pas un bon film, c'est tout juste un film "nécessaire", "inspiré de faits réels", c'est à dire la pire raison de faire du cinéma, on le sait bien... Mal rythmé - la description au...

le 27 janv. 2020

43 j'aime

10

Scandale
blacktide
4

Everybody Knows that the Dicks are loaded

Qu’il est pénible de faire face à ces films « dans l’air du temps ». Des films aussi fragiles qu’une bulle au contact de l’air : elle s’élève, attire les regards avant de disparaître aussi vite...

le 21 janv. 2020

39 j'aime

Scandale
PierreAmo
9

Les Trois-"hyènes" et les Mad "Men"...Infotainment à son meilleur. Les femmes de StepFox.

Vu hier soir (le 12/02/20), je postillonne ici des remarques très diverses avant d'encore les oublier. Ce texte est une macédoine de remarques mélangées (voire un "sushi" d'infos; nourriture...

le 13 oct. 2022

21 j'aime

23

Du même critique

Ma Loute
Thibault_du_Verne
3

MA LOUTE – 6/20

Autant le dire d’emblée, Ma Loute m’est passé complétement au-dessus. Comédie burlesque, voir grotesque, empreinte d’une excentricité peu commune, le film de Bruno Dumont est si singulier qu’il ne...

le 23 mai 2016

42 j'aime

7

The Strangers
Thibault_du_Verne
4

THE STRANGERS – 8/20

Le mélange des genres est un exercice assez courant dans le cinéma sud-coréen (on se rappelle de l’ovni The Host de Joon-ho Bong), ce n’est pas ce qui étonne le plus à propos de The Strangers. On ne...

le 27 juil. 2016

38 j'aime

En attendant Bojangles
Thibault_du_Verne
6

Cinéma | EN ATTENDANT BOJANGLES – 13/20

Tombé sous le charme de cette fantasque histoire d’amour à la lecture du roman d’Olivier Bourdeaut, j’étais curieux de découvrir quelle adaptation Regis Roinsard allait en tirer, lui qui a prouvé...

le 22 janv. 2022

26 j'aime