Sous ses aspects de comédie de mœurs douce amère, très ancrée dans les fifties, "The Seven Years Itch" s'avère avant tout un bon petit coup de pied dans la fourmilière de l'American Way of Life. Sarcastique, caustique et malicieux, il vient remettre en question le modèle sociétale de la famille nucléaire et l'omniscience patriarcale.


Soit un monde d'homme (avec un petit h), fait par les hommes, pour les hommes, et dans lequel la femme est soit la mère au foyer, bobonne qui cuisine et élève les gosses, quand monsieur trime au bureau pour assurer tout le confort.


Ou alors, la femme objet de toutes les tentations, démon contemporain remettant en cause un modèle semblant parfait sous tout rapport. Car ce n'est pas l'homme marié qui est en tort, c'est la femme belle et sexy, qui envoûte de sa grâce et de sa beauté. Incarnée ici par une Marilyn Monroe glamour au possible, dans le rôle de la belle blonde ingénue, perçue comme un corps avant d'être un cerveau,


Égratignant avec acidité la vitrine de nos sociétés contemporaines, le métrage remet en question la place de l'autorité centrale que s'est octroyé l'homme. Sur un ton parodique et cocasse, parfois agressif, Billy Wilder cultive l'absurdité de son récit, en humiliant gentiment son personnage principal. Un père de famille se rêvant en Don Juan de pacotille, séducteur hors pair, à qui les femmes ne peuvent résister.


Ridicule petit bureaucrate incapable de se remettre en question, rejetant sans arrêt la faute sur les autres, et persuadé d'avoir le contrôle, il va jusqu'à dépasser les bornes, pour atteindre les limites de la séduction. Aux frontières du harcèlement. Infidèle, faible, menteur et couard, il en rappel à ces bonnes vieilles thèses masculinistes, telles que défendu aujourd'hui par des personnes comme Alain Soral. Et pourtant, nous sommes en 1955.


D'une modernité confondante, "The Seven years itch" fracasse les codes de la famille américaine, en questionnant l'adéquation du couple face aux tentations de la société. Par la personne douce, ingénue, et faussement idiote, jouée par Marilyn Monroe, la réflexion qui se dessine au long du récit s'oriente vers la place de la femme au cœur de cette société. Où elle apparaît comme un bien de consommation. Face à l'homme, pauvre petite victime de la perte de son autorité, incapable de percevoir qu'il ne contrôle plus rien, tout en en restant persuadé.


Drôle, espiègle et divertissant, ce huis-clos, sous ses airs innocents de vaudeville ou de comédie de boulevard inoffensive, frappe fort. Ne laissant jamais son propos à la merci de la facilité, et ne lassant jamais son spectateur par du déjà-vu. Flirtant avec les limites (il ne faut pas oublier qu'en 1955, Hollywood est encore soumis au Code Hayes), Billy Wilder s'amuse ainsi à jouer avec son propos et ses contraintes, avec un art rare de la comédie.


Du haut de 2019, cette fine critique de l'American Way of Life, s'avère diablement actuelle, avec son constat d'un monde en changement, qui est déjà témoin de ses évolutions. Pour s'en convaincre, il suffit de regarder la place de la femme dans la modernité de 1955, et sa place aujourd'hui en 2019.
Les mœurs évoluent lentement, mais ils évoluent. Il faut juste se montrer patient, et laisser le temps à la société de digérer ces évolutions. Au lendemain du mouvement #metoo, il est ainsi plaisant de pouvoir regarder hier, avec un œil amusé. Où une œuvre comme "The Seven Years Itch", permet de réaliser l'ampleur des acquis obtenus pas nos sociétés occidentales, l'importance de les maintenir, et chercher à les améliorer encore. Car le monde change, et ça, ça ne date pas d'aujourd'hui.


-Stork._

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le 10 févr. 2020

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Peeping Stork

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