Ce sont souvent de minuscules mais tenaces poussières qui grippent les mécanismes les plus performants. La pérennité des relations humaines, amicales ou amoureuses, est de la même façon mise à mal par de petits événements révélant en filigrane des points de vus divergents et obligeant à reconsidérer le sentiment. L’avalanche qui balaie la terrasse du restaurant d’altitude où a pris place une famille suédoise idéale : le père, la mère et deux enfants charmants, dans les Alpes françaises constitue ainsi l’élément déclencheur et traumatisant qui va faire vaciller l’équilibre familial. Tandis que la mère protège ses deux enfants, le père s’enfuit à toutes jambes, n’emportant que…ses gants et sa tablette informatique. Quand tout revient à la normale, avec plus de peur que de mal, le couple doit affronter la lâcheté de l’un et le malaise de l’autre.

Curieusement, le plus réussi de Snow Therapy n’est pas sa dimension psychologique et analytique. Pire, le film qui n’évite pas la facilité en faisant des hommes d’incorrigibles lâches offre une lecture pour le moins schématique, voire manichéenne, des rapports entre les deux sexes. Une impression confirmée lorsqu’un couple d’amis vient rendre visite à la famille. La subtilité du réalisateur suédois Ruben Östlund s’exerce davantage dans l’installation de l’atmosphère étrange et même carrément anxiogène qui entoure la station alpine : détonations pour provoquer des avalanches, ballet nocturnes des dameuses, immensités blanches silencieuses, parfois plongées dans le brouillard, technologie omniprésente dont les skieurs sont dépendants. La haute montagne qui semble révéler d’obscurs instincts grégaires (une scène de transe collective) est devant la caméra du réalisateur de Play un territoire inhospitalier, prêt à mettre en lumière les mesquineries et les traits détestables de la personnalité.

On est d’autant plus intéressés par l’étrangeté des lieux que Ruben Östlund ne maintient pas le cap de la charge et de la férocité, s’empressant de tout faire rentrer dans l’ordre, même si une ultime séquence, presque anodine et burlesque, montre les dégâts collatéraux, peut-être même irréparables, d’une mésaventure, véritable avalanche émotionnelle.
PatrickBraganti
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le 10 févr. 2015

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