Et pour ce soir :


Sorry to Bother You, 2018, de Boots Riley, avec Lakeith Stanfield dans le rôle de Cassius "Cash" Green.


Synopsis non-recommandé par le MEDEF : Cash est un mec sans argent d'une Amérique aussi pessimiste que lui, comme si elle avait fini par accepter l'ère Trump. Pris à la gorge par le besoin de thune, vivant dans le garage de son oncle avec sa nana Detroit, artiste, il finit par accepter un taf de télémarkéting. Les résultats sont mauvais, la paye à la commission donc aussi minable, il rencontre Squeeze, un autre vendeur du même taf qui cherche à créer un syndicat pour avoir un travail dans des conditions dignes. Il se laisse tenter par cet idée, jusqu'au moment où un de ses collègue lui donne la solution miracle : Parler avec sa voix de blanc. Et là, tout à coup, tout fonctionne ! A lui les commissions, à lui la reconnaissance de sa direction (au grands dam de ses potes qui se syndicalisent) et surtout, une promotion pour devenir un Super Vendeur (Power Seller en VO). Et là, il va découvrir qu'on ne vends pas tout à fait la même chose que des encyclopédies, en haut...


Je vous avoue, ça ne va pas être la critique la plus simple que j'ai écris jusqu'ici. Alors on va commencer par la base. STBY est une fable teinté de fantastique sur le capitalisme marqué par un style qui est franchement appuyé. La bande-annonce cite d'ailleurs Gondry et Spike Lee, le premier sur la forme, le second sur l'engagement. Alors pour le premier, y'a deux-trois idées à la Gondry (comme celle de faire que Cash se retrouve face à ceux qu'il appelle comme si son bureau tombait du plafond pour finir devant eux) mais ça s'arrête là. Quant à Spike Lee, on a effectivement quelque chose de plus marqué dans le côté cinéma engagé. La différence est que Spike Lee est engagé dans la cause pour la population afro-américaine alors que Boots Riley, le réalisateur, est déjà plus orienté sur la cause des travailleurs pauvres et en général de la dignité dans le travail, quelque chose que le capitalisme a tendance bien dévorer (Coucou Manu et ton taf en traversant la rue !).


Il y a plusieurs choses à faire ressortir du film. Déjà, je dirais que je ne l'ai pas adoré, mais que je l'ai trouvé vraiment intéressant. Sur certains points, il y a des difficultés et des errances peut-être explicables par le fait que c'est un premier film. Je pense notamment à un Deus Ex Machina vers la fin ainsi que des arcs de scénarios qui ne servent à rien. Le film prend d'ailleurs une trajectoires très différentes sur son dernier tiers, s'engageant dans un chemin franchement inattendu (et chapeau à la BA qui ne spoile rien du tout sur ce twist, vu qu'elle ne parle presque pas de la compagnie en question) et assez dérangeant mais finalement pas si impensable dans notre monde, vu qu'on s'engage d'une certaines façon dans cette voie. Le rôle de Danny Glover aussi, bien que j'ai aimé l'entendre dire qu'il est trop vieux pour ces conneries est finalement très limité, parce que outre le côté "teach me Senpaï" et le fait qu'il symbolise ce qu'ils appelle la Silver Economy (J'appelle ça plutôt la preuve que le système ne cherche qu'à épuiser jusqu'au bout le travailleur même post-retraite, mais ça doit être mon côté gaucho), il ne sert guère au récit.


Mais tout cela est contrebalancé par l'acteur principal, Lakeith Stanfield qui est assez tordant dans la première moitié du film (j'aime beaucoup ce passage où il demande à la station essence "40 pour la 2" et donne 40 cents...), avec son petit jeu de sourcil, mi-benêt, mi-touchant, comme s'il savait qu'il dit des conneries et que lorsqu'on le met devant le fait, il se dit qu'il est un peu naze quand même. La 2ème partie s'attachant plutôt à un début de prise de conscience, on voit un style plus terre-à-terre, dramatique. Et la réalisation de Boots Riley est plutôt marquante. Il y a aussi quelques travellings compensés (On avance la caméra et on dézoome en même temps, ou l'inverse, ce qui écrase les profondeur en faisant le focus sur la personne ou l'objet au centre de l'écran, ce qui à tendance à créer une pression sur le coeur de l'objectif ou, à l'inverse, à le mêler dans un ensemble sans le dissocier du décor). D'ailleurs, un petit jeu, pour savoir si un film vous a visuellement marqué, essayez de vous rappeler des scènes du film que vous avez aimées quelques heures voires jours après l'avoir vu et voyez à quel point le souvenir est précis. S'il est précis, c'est que :



  • Soit vous avez vu le film 30 fois, et donc bah... c'est normal, vu que vous l'avez vu 30 fois.

  • Soit que le film a des moment visuellement marquant, et ça, c'est plutôt bon signe.


Et dans le cas de STBY, il y a pleins de petits détails qui font que ça marque, comme le style très doré et lumineux de l'ascenseur des Power Sellers, de son code pour monter à l'étage composé d'une centaine de chiffre, du couloir en bois foncé avec ses portes jade, vert olive, vert-jaune et autre, de cette vidéo en stop-motion à la pâte à modelée toute moche, des émissions vidéos débiles... D'ailleurs, point marrant, durant la première moitié du film, j'associais pas mal le film à Idiocracy à cause de son émission où des mecs viennent se faire casser la gueule pour plus ou moins sans raisons (comme l'émission Ow Mes Boules! dans Idiocracy où un mec se fait latter les couilles sans arrêts juste parce que c'est drôle de voir un mec se faire latter gratuitement les couilles) et où la télé a l'air si débilisante... Hey mais comme dans notre monde en fait ! Fun Fact N°2, Terry Crew jouait également dans Idiocracy, donc bon...


Bref, j'essaye de rester cadré dans mes idées mais c'est pas facile, le film étant comme mes idées, parfois très éparpillé. Pas simple de le noter, mais je donnerais bien un 7. Pas parfait du tout, peut-être même juste bon, mais avec un petit sceau du style "Vraiment à voir" parce qu'il y a vraiment des trucs intéressant, à la fois visuellement et scénaristiquement. Du coup, un peu osef de la note, faites-vous votre propre opinion dessus.

Tony_Gendron
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 7 févr. 2019

Critique lue 180 fois

Tony Gendron

Écrit par

Critique lue 180 fois

D'autres avis sur Sorry to Bother You

Sorry to Bother You
James-Betaman
7

What the f*** man?

Comment parler de Sorry To Bother You ? Non sérieusement, comment aborder la chose ? Est-ce que je spoile pour entrer en profondeur dans l'analyse ? Est-ce que je dis vite fait mon...

le 7 févr. 2019

26 j'aime

Sorry to Bother You
Samu-L
7

Boots camp

Boots Riley nous offre pour son premier film une satire mordante du milieu de la télévente, de l'entreprise, de l'aliénation et de la soumission totale de l'individu au sein d'un monde du travail qui...

le 17 nov. 2021

20 j'aime

Sorry to Bother You
Adao
8

1er coup de coeur 2019

Quiconque visionne Sorry to Bother You doit s’attendre à regarder un ovni cinématographique à part. Imaginez une mise en scène à la Michel Gondry, une satire à la Spike Lee et un humour façon Jordan...

Par

le 16 janv. 2019

14 j'aime

Du même critique

Pokémon Violet
Tony_Gendron
3

Le plantage évident (attention, critique très longue)

Et pour ce soir :Pokémon Violet, 2022, développé Game Freak et édité par Nintendo.Synopsis ouvert : Dans le pays de Paldéa, un pays rappelant vaguement l’Espagne, nous allons incarner un gamin de 12...

le 10 déc. 2022

4 j'aime

2

5 centimètres par seconde
Tony_Gendron
9

Ce trait, cette animation, que c'est BEAU !

Et pour ce soir : 5cm par Seconde, 2007, de Makoto Shinkai, avec Adrien Solis et Céline Melloul qui double respectivement Takaki et Akari. Synopsis lointain : Takaki et Akari sont deux collégiens...

le 14 mars 2020

2 j'aime

Insomnia
Tony_Gendron
7

Elles sont longues, ces journées...

Et pour ce soir : Insomnia, 2002, de Christopher Nolan, avec les brillants (et le fort regretté) Robin Williams et Al Pacino dans les rôles respectifs de Walter Finch et Will Dormer. Synopsis brumeux...

le 14 mars 2020

2 j'aime