En regardant "Spring Breakers", je me suis dit que ce film était la fusion entre "Tree of Life" et "Drive". La comparaison avec Malick ne s'arrête pas là puisque Korine semble se proclamer comme un anti-Malick. Anti ne veut pas dire qu'il y a rupture totale ; Korine maintient une narration éclatée, mais pour raconter une histoire nettement moins spirituelle. La poésie est toujours là mais le glamour remplace la grâce. Quant à la référence à Refn, c'est justement par rapport au propos plus glauque, mais aussi par cette utilisation des filtres couleurs.
Petite réflexion personnelle. Je ne suis pas d'accord lorsque j'entends dire qu'un film est bon parce qu'il fait réfléchir, comme si le film était une belle thèse appuyée par de bons arguments et de bons contre arguments. Je trouve cela absurde car au fond, le fond du film ne tient que sur un post it. Le reste, c'est de la mise en place. Une page d'un bouquin pourra demander 20 minutes de film en guise d'adaptation. Pour moi, il n'y a pas mieux qu'un livre pour réellement défendre une opinion, avancer des théories. En film, ce sera toujours superficiel, malgré les apparences. Et je dois dire que ça me rend triste d'entendre des gens dire : ce film te fait réfléchir. Peut-être que ça fait réfléchir en tant qu'ouverture à un thème. Mais en soi, je pense que ceux qui se disent interpelés par un film, étaient déjà possédés par ces idées avant d'aller le voir. Alors conforté dans ses convictions, le spectateur aura tendance à approuver le film ou tout au moins son message. Mais de réflexion il n'yen a pas vraiment beaucoup. Et "Spring Breakers" fait partie de ces films avec un message rikiki qui peut alors truover écho dans l'une ou l'autre tête. Mais rien n'est développé, tout est superficiel. C'est sans doute pour cela que je vois le cinéma et même l'art en général comme un divertissement, et non une réflexion complexe et profonde. Ce qui ne veut pas dire que l'artiste n'a pas fait ses recherches, juste qu'il lui sera impossible de tout mettre dans un film.
"Spring Breakers" est fun. D'abord parce que c'est diablement sexy. Qui a dit qu'en art la branlette n'était que intellectuelle ? Les quatres héroïnes sont canons, Selena certainement la moins attirante (mais son côté innocente la rend peut-être plus aguichante). Ensuite, le film est une belle 'réflexion' sur le montage. C'est-à-dire que Korine se plaît à tout mélanger. Des phrases entendues au début prennent une tournure ironique différente quand on arrive à la fin. Malheureusement, Korine n'arrive pas à la taille de Malick, et même si son film est plus court, il y a plus de moments où ça stagne, des plans qu'on aurait pu laisser sur la table de montage. La première partie est d'ailleurs moins passionnante que la seconde, et ce malgré les belles courbes qui nous sont montrées.
La narration est assez efficace. Je suis curieux de voir à quoi ressemble le scénario du film. Et comment Korine a-t-il vendu ce projet? Beaucoup de productions différentes sont citées dans le générique. En tous cas c'est assez efficace. Sur le moment c'est lent. Puis lorsque l'auteur révèle le double sens, on se dit ha ouai. Ca n'empêche pas les lenteurs du début mais bon... ca aide à pardonner un peu. Mais surtout c'est cette fameuse seconde partie où tout démarre vraiment. Des scènes plus spectaculaires, où la tension naît enfin, ont lieu sous nos yeux ébahis. Jusqu'à une fin assez choc.
"Springbreakers" n'est jamais qu'un vestige des rituels hérités de nos ancêtres. Vous savez, ces trucs bizarres que les indiens font encore en Amazonie : passer 4 mois dans un forêt à manger des fourmi rouges, se peindre le corps, prendre une drogue, se laver et rester à l'écart pendant 4 autres semaines. Quand l'enfant revient, il est devenu adulte. Le film de Korine ne parle que de ça au final. Sauf qu'au lieu de montrer le traditionnel Spring Break, il dévie nos héroïnes de leur trajectoire logique et fait quelque chose de cinématographique. Ces jeunes gonzesses tombent dans un monde différent de leur quotidien. Plus violent sur le plan physique, pas nécessairement plus sur le plan moral. N'empêche que ces 4 gonzesses ont fait des choix tout au long du film et sont rentrées chez elle adultes. Du moins les deux dernières, aprce que les deux autres sont rentrées trop tôt. Ce n'est pas pour rien si on a droit qu'à deux conversations téléphoniques, celles qui sont restées jusqu'au bout.
On pourra tout de même regretter la pauvre utilisation de la jeune Faith. Finalement son background religieux ne sert qu'à justifier son départ (quand la tentation est là, la sortie est aussi là). Mais en soi ça aurait pu servir de moteur narratif à plusieurs instants. Peut-être que l'auteur s'est ravisé. Il aurait alors pu faire sauter le personnages. Surtout qu'on voit la plupart du temps les filles par trois, rarement par quatre.
Bref, Spring Breakers est un bel objet sur le plan de la forme et même de la narration. Il y a tout de même quelques longueurs (une première moitié qui aurait pu être réduite à 20 minutes) et quelques maladresses qu'on pourra pardonner pour un final assez rock 'n roll. C'est beau l'art.
Et puis Britney Spears...
PS : au fond, ce film n'est jamais que du pop art...