Tout d'abord...

Je ne suis pas un fan de Star Trek. Je ne connais que peu l'univers créé par Gene Roddenberry; J'ai du voir quelques épisodes de la série originale et quelques autres de l'un ou l'autre des spin off de cette dernière. Ce n'est donc pas en fan de Star Trek, ni en amateur éclairé que je suis allé voir le tout dernier film de J. J. Abrams, Star Trek.

Ah ! Ah ! Ah ! / Pffff...

Environ deux heures après les premières images du film, le générique de fin. Les lumières se rallument dans la salle. La plupart des gens autour de moi sourient, visiblement satisfaisant par le moment qu'ils ont passé. Moi-même, je récupère mon manteau et mon chapeau, je me lève et rejoins la sortie, partagé entre l'envie de rire et l'indignation. Pour comprendre mon sentiment, un petit résumé du film est tout d'abord nécessaire.

L'U.S.S. Kelvin a découvert une singularité d'où émerge subitement un gigantesque vaisseau romulien. Ce dernier attaque aussitôt, ce qui se termine par la destruction de l'appareil de la Fédération. À bord de ce dernier se trouve le père de James T. Kirk, qui va se sacrifier pour sauver l'équipage, sa femme et son fils qui vient juste de naître.
Un certain nombre d'années plus tard (un peu moins de vingt ans sans doute), James Kirk est devenu un beau, fort et intelligent jeune homme, mais une tête brûlée rebelle qui se laisse convaincre d'intégrer Star Fleet pour suivre les traces de son père. Il brille au cours de la formation et celle-ci se termine en urgence quand Vulcain est attaquée, forçant le lancement de nouveaux appareils dont les cadets formeront les équipages. Kirk et tous les éléments centraux de l'équipage mythique de l'U.S.S. Enterprise embarquent pour leur première mission.
La suite, je ne la raconterai pas. Par contre, il me faut expliquer d'où sortent les Romuliens. C'est simple – enfin, pas vraiment... – du futur ! Ils ont vu leur planète détruite et leur chef, Nero, veut se venger de la Fédération et de Spock qu'il tient pour personnellement responsable. Projetés dans le passé par accident, ils vont affronter une Fédération où James Kirk et Spock ne sont encore que des membres inexpérimentés de Star Fleet...

Voilà, voilà. Je peux maintenant expliquer pourquoi « Ah ! Ah ! Ah ! » et « Pffff... ».
Tout commence bien, jusqu'au moment où on commence à comprendre que les Romuliens viennent du futur (ce qui doit arriver aux environs du premier quart d'heure). Je dois préciser ne pas aimer, en général, les histoires de voyage dans le temps parce qu'elles sont souvent mal faites. Gérer les paradoxes temporels, entrevoir toutes les conséquences de telle ou telle perturbation dans le flux des causalités nécessite rigueur et précision. Si les choses sont bien imaginées, on a quelque chose du genre de Universal War One de Denis Bajram et, dans une moindre mesure, Le Déchronologue de Stéphane Beauverger. Si les choses sont mal faites ou qu'on veut trop en faire, on a quelque chose du genre de La Brèche de Christophe Lambert ou, pire, des Chronolithes de Robert Charles Wilson.
Avec Star Trek, J. J. Abrams tombe à peu près dans tous les pièges de l'histoire de voyage dans le temps : non traitement des paradoxes, Deus Ex Machina, propulsion des personnages à un rang d'aventuriers qui ne leur sied pas...

Je crois que le film, jusque-là encore d'un niveau acceptable, sombre totalement au cours des scènes qui se déroulent sur la planète gelée voisine de Vulcain, où Kirk se retrouve catapulté bien malgré lui. On y obtient les explications qui éclaircissent – à ses dépends peut-être – un scénario fragile, des absurdités biologiques et la fameuse apparition de personnages providentiels.
Premier point : l'attaque des monstres. On y trouve là la recette traditionnelle de l'attaque du héros par la faune d'une planète hostile, avec le schéma plus qu'usité du plus gros qui mange le plus petit. On passera sur la couleur grotesque du prédateur en milieu arctique, son obnubilation à traquer une proie plus petite que celle qu'il vient d'attraper et finalement la facilité avec laquelle elle abandonne sa traque.
Deuxième point : Spock. En même temps que les Romuliens, Spock est venu du futur. Il va expliquer à Kirk le projet des vilains et ce que le héros soit faire pour les arrêter. J'explique plus avant ci-dessous pourquoi c'est un point névralgique du scénario de Star Trek.
Troisième point : Montgomery Scott. Comme par hasard se trouve sur cette planète, dans une base de Star Fleet perdue au milieu des immensités gelées, un génie de la mécanique quantique, inventeur de l'équation qui permet de calculer une téléportation à bord d'un vaisseau en distorsion. Oh ! Le beau Deus Ex Machina !

J'espère ne pas en avoir trop dit en révélant qu'il y a un Spock du futur dans le film, mais c'est indispensable. On a donc deux Spock dans Star Trek, un jeune et un vieux (avec du coup apparition de Leonard Nimoy). Et là, c'est le drame... Car si les Romuliens viennent du futur parce que leur monde a été détruit à cause de Spock, mais que le Spock du passé le sait, on peut penser que dans le futur, il fera ce qu'il faut pour que Romulus ne soit pas détruite, donc que les Romuliens ne reviennent pas dans le passé pour se venger, donc que Spock ne saura pas quand il doit agir pour sauver Romulus, donc... Aaaaaah ! On est en plein paradoxe temporel ! Et la fin du film omet évidemment totalement cet état de fait – s'en amuse même avec les dernières paroles du vieux Spock. Sans compter que c'est Spock vieux qui aide Kirk et Spock jeune à se réconcilier, donc à travailler ensemble et devenir amis, sans quoi Star Trek ne serait pas Star Trek.
Bon. Si vous m'avez suivi, vous devriez comprendre ce qui me dérange. Juste le genre de très gros détails qui me gênent beaucoup et qui détruit – de mon point de vue – un film.

Enfin, c'est plus un détail mais cela m'exaspère : l'incroyable qualité de tous ces petits jeunots de l'U.S.S. Enterprise. Ils sont cadets mais travaillent mieux, savent plus de choses que leurs aînés expérimentés. J'ai donc eu les plus grandes difficultés à m'identifier aux différents héros : Star Trek tend à être un film pour adolescents ou spectateurs tout juste sortis de l'adolescence (en gros, public de quinze à vingt ans). On y voit des jeunes donner des leçons aux vieux, les surpasser, faire la peau à des méchants plus costauds et qui s'y connaissent mieux dans l'art de la guerre – surtout au corps à corps – et caetera. Bof, bof.

D'où le « Ah ! Ah ! Ah ! » qui tend à se moquer du réalisateur hollywoodien qui en met plein la vue mais rien dans la cervelle, et le « Pffff... » qui exprime mon indignation face à un scénario absurde.
En fait, j'ai peut-être tout simplement encore oublié de poser mon cerveau à l'entrée du ciné, comme pour X-Men Origins - Wolverine. Car Star Trek, somme toute, est un film divertissant, avec des effets spéciaux grandioses. On ne s'ennuie pas au cours des deux heures qu'il dure. Mais vous pouviez faire mieux, Mister Abrams.
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le 18 déc. 2010

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