Maintenant qu'on a vu les pubs, vous pourriez envoyer le film ?

Bien. J'ai revu la Menace Fantôme après quelques années d'omerta, tant la gueule de bois avait été grande.

Oui, je suis un fan de star wars, oui cette menace m'a plutôt fait l'effet d'un mollard craché à la gueule et non ce n'est pas que pour Jar Jar Binks ni parce qu'on n'y voit pas Han solo en couche-culotte. Parce que j'ai voulu revoir cet épisode 1 comme un film. Pas une préquelle de mais juste comme un film. Et même comme ça, je n'y ai pas vu grand-chose à sauver (mais un peu plus tout de même puisque j'ai rehaussé sa note de 2 points).

Tout d'abord c'est beau. Autant ne pas être de mauvaise foi, Naboo est magnifique, la ville Gungan aussi, les vaisseaux sont travaillés, il y a de réelles bonnes idées en terme de design, de costumes, d'architecture, on ne peut pas le nier. Lucas a fait appel à une excellente équipe et le résultat se voit à l'écran (surtout au cinéma). "La menace Fantôme" en met plein la vue, en opposition à l'austérité un peu contrainte de l'ancienne trilogie et sincèrement, j'ai avidement bavé sur les tenues d'Amidala et un peu regretté que les making-off n'approfondissent pas davantage le travail de recherche visuelle sur le film.

Ensuite, la musique de John Williams a su se renouveler sans perdre sa force : "Duel of Fates" est un thème extrêmement classe et percutant, qui sait porter l'intensité de l'action. Du beau boulot, sans s'autoplagier tout en conservant cette force dans la musique. Pour quelqu'un qui découvre Star Wars, la rencontre est certainement réussie.

Petite mention également à Jack Lloyd, qui n'endosse pas ici un rôle facile et s'en sort avec les honneurs, parvenant à ne pas être trop "chérubin" et à présager de la future tête à claques butée et désobéissante qui finira par basculer. Bien que ce soit à peine suggéré, quelque chose dans sa morgue et son enthousiasme un peu trop débordant - notamment à l'égard de Padmé - pose les premiers jalons. Nathalie Portman est impeccable, également, altière mais pas figée dans un rôle de potiche.

Derniers points positifs : une course de pod qui a pas mal de gueule - même si on en devine l'issue dès le départ - et un méchant fort classe - quoique très mal utilisé. Il va par ailleurs me servir de transition.

Darth Maul, pour moi, c'est la synthèse de tout ce qui va et ne va pas dans ce film : par sa seule présence et son rendu visuel, son art du combat, il sait poser le danger, la tension. Sa seule apparition augure d'un danger immédiat, sans qu'il n'ait besoin de décocher un mot. Et que fait Lucas de ce potentiel ? Rien. Darth maul cachetonne, vient se battre deux fois, se faire tuer et point final. Il aura assuré le quota combat au corps-à-corps du film.

Ensuite, le visuel ne fait pas tout, surtout que les images de synthèses accusent déjà leur âge au bout de quinze ans et que les écrans verts commencent à se voir. Je doute que le film passe encore dix ans sans perforer les rétines du spectateur. C'est ça l'inconvénient de vouloir absolument utiliser un numérique pas encore au point, ça devient daté en une décennie, aussi esthétique soit le film. Ce qui va torpiller son principal point fort, à terme.

Autre chose qui m'a particulièrement frappé - et je pense qu'il n'est nul besoin d'être un fan méphitique et borné pour le voir - c'est le jeu calamiteux d'Ewan Mc Gregor et Liam Neeson. Ils sont inexpressifs, éteints. Soit, ils sont supposés incarner des chevalier jedi, sorte de maître zen mais qui serait aussi impavide (je vais être sympa et pas dire "amorphe") quand en temps de paix, une simple puissance commerciale use de méthodes d'assassinat sur des représentants du gouvernement ? Je ne parlerai pas des combats, voir Ewan Mc Gregor et Liam Neeson tournoyer sur eux même comme des toupies m'ayant été assez pénible à voir, quand on n'a pas tout simplement l'impression qu'ils ne brandissent pas leur sabre mais se contentent d'incliner la poignée pour laisser les effets spéciaux faire le reste.

Le scénario est perclus d'incohérences et paradoxalement inutilement compliqué (les magouilles politiques, monsieur Lucas, on en use quand on maîtrise son sujet. Pas quand on est plus habitués à raconter des contes pour enfants petits et grands) mais il est surtout terriblement froid, sans enjeu, sans merveilleux. On m'a dit à l'époque que si je n'avais pas aimé c'était parce que le film était pour les enfants. Et c'est la plus mauvaise excuse que j'ai entendu : le film est un enchaînement de créatures et de machines, un catalogue, magnifiquement présenté par un épouvantable comique pratiquant l'humour "tarte à la crème", ce cher Ja-Jar, honni des fans et que je considère personnellement comme une insulte faite à l'intelligence des gosses. Je sais que certains ont aimé à l'époque et ça m’écœure de me dire que Lucas les prend à ce point pour des débiles. Mais au fond, il a raison, le film a bien marché - même si les fans lui ont craché à la gueule- il s'est amusé avec le numérique comme un petit fou et a vendu ses jouets.

Pour se replacer du point de vue du fan - qui est apparemment toujours borné, ne réfléchit pas et trouve qu'on lui malmène sa madeleine - imaginez donc que celui qui venait vous raconter de jolies histoires se pointe un jour avec un sac plein de jouets qui couinent et vous le jette à la gueule. Oui, Lucas a TOUJOURS fait du merchandising autour de Star Wars. Mais ça n'autorise en aucun cas à bâcler artistiquement, surtout lorsqu'on a les moyens, le temps et aucune pression de la part des studios.

Scénario bordélique et totalement détaché de l'humain, images de synthèse qui ne passeront pas la prochaine décennie, humour bas de gamme et totale absence de magie ou de merveilleux, malgré quelques moments de grâce, c'est donc comme ça que George Lucas voulait son film. Car c'est bien là le reproche que je fais à "La Menace Fantôme" en tant que fan. De réussir dans ce qu'il entreprend. Et ce qu'il entreprend, plus précisément, à savoir contenter un fan de grosse image de synthèse dans ses expérimentations.

Et en tant que spectateur lambda, d'être un film abêtissant pour les mômes et terriblement chiant, au niveau de ce que Disney a fait de pire.