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Rey Theme - Star Wars VII
Te dire que j'attendais ce Star Wars, que je suis un fan de la première heure, que j'ai un pyjama à l'effigie de Yoda et que tous les dimanches je me déguise en Princesse Leïa pour faire des pancakes, ce serait te mentir.
Ça serait même carrément malhonnête.
Je suis pas du genre décollé du carafon à déblatérer sur les Midi-chloriens, la dernière théorie foireuse comme quoi Kylo est le fils incestueux de Leïa et de son frère.


Nan. Moi j'suis le spectateur sympa, pas trop regardant.
Le genre de type qui a grandit avec la prélogie, qui a aimé la profusion de la Force, les Jedi se tabassant hardiment, Yoda virevoltant et Ewan McGrégois dans le rôle d'Obiwan.


J'suis du genre à affectionner la trilogie originale, un peu plus le 5 et le 6 même. Du genre à pas foutre le quatre sur un piédestal, mais à aimer le voir de temps en temps. Pour le fun.
Et surtout, je suis du genre à imaginer tout ce qu'on pourrait faire avec un univers au potentiel aussi immense que celui de Star Wars. Un univers aussi vaste que les limites de l'imagination, où chaque planète pourrait être une découverte, chaque race d'alien une idée. Où l'on me raconterait le combat du bien contre le mal mille ans avant les évènement de la prélogie, comme ça, parce que la liberté créative pourrait être immense. Ou bien mille ans après, peu m'importe.


Un Star Wars qui ne serait pas conditionné par le modèle pesant du quatre, coincé par la trame narrative de ses pesants aînés de la trilogie de Lucas. Un de ces films où l'on pourrait voir de l'action décomplexée côtoyer une finesse de caractérisation des personnages. Une genre de réunion de types charismatiques à souhait, que ce soit des méchants bien méchants ou des maîtres Jedi refoulant le charisme à dix kilomètres à la ronde.
J'suis pas un fan pur et dur, mais je me demande souvent ce qu'on pourrait inventer dans un univers aussi riche.


J'avais même pas l'envie d'aller le voir, ce Réveil de la Force, tiens. Concours de circonstances, je ne suis pas mécontent d'avoir pu forger mon propre avis au cinéma. Histoire de voir ce que J. J. Abrams avait dans le ventre.
Il me semble que mon cinq est la note la plus juste, objectivement comme subjectivement, que l'on puisse donner à ce Star Wars. Je vais essayer d'appuyer cette note par une critique. À un moment, ça va spoiler, mais t'inquiète, je te préviendrai.


Lorsque la chose à commencée, je me suis souvenu des critiques négatives, et je me suis gentiment mis à penser que les gens étaient un poil désabusés.
On ouvre sur une scène sur une planète désertique, c'est pas original mais foutrement bien filmé. Immédiatement, la mise en scène caractérise notre nouveau grand méchant : un type furieux, emporté, violent, aussi faible que fort. Un gars qui maîtrise la force comme pas deux, avec un chouette masque. Un brin impulsif, mais plutôt terrifiant.


Tout s'annonce bien, d'autant que va suivre la magnifique scène d'introduction de Rey. Comment ne pas faire, de concert avec Fritz, le rapprochement avec Nausicäa ?
L’émerveillement est constant dans l'exploration de cet énorme vaisseau éventré, couché dans une position improbable sur les sables brûlants. Abrams ravit les mirettes, enchaînant sur des paysages désertiques. Des plans envoûtants sur fond de soleil couchant tandis que Rei chevauche un pod pétardant.


Les batailles navales ne sont pas en reste, on se prend à rêver devant tant de fluidité, de légèreté. Les X-Wing virevoltent, échappant avec grâce aux chasseurs de l'empire. L'espace s'étire, explose, on passe de l'infiniment grand à un espace clôt avec beaucoup d'aisance. À ce titre, la première course-poursuite avec le Faucon Millenium est un petit bijou.
Si on peut regretter le manque d'inventivité pour ce qui est des planètes, des designs et autre, on se prend toutefois à poser un regard attendri sur les masques en latex rendant l'ensemble plus organique. On s'ébahit devant la qualité, la virtuosité des combats spatiaux.


L'émerveillement reste toutefois conditionné par le visuel et quelques saillies bien senties, quelques traits d'humour.
Une bienveillance nous prend lorsque Finn désamorce la tension, l'interprétation de Rey par Daisy Ridley est sympathique, même. Sans plus, un peu brut de pomme, si tu veux.
Il y a un petit côté charmant chez ce personnage, même si j'espérais qu'elle soit plus teigneuse, plus volontaire. Que ses doutes ne soient pas introduits par des pirouettes scénaristiques douteuses et qu'elle ne souffre pas du syndrome Princesse en détresse. Même si de ce côté, c'est léger.
Je balaye du revers de la main les autres personnages. Finn est un bon gars, un poil cliché du sidekick rigolo, si tu veux mon avis, mais ses dialogues sont souvent plaisants. Poe est trop peu présent, dommage d'autant que lorsque tu as Oscar Isaac, tu dois en profiter un peu mieux. Là il confine à l'anecdotique, chic sans choc.


Non, ici, le casting manque de saveur, de mordant, d'épique. Je ne te parle même pas des bad-guys, entre un Kylo Ren frisant le gamin teigneux de cp ou bien Voldemort le big boss ... ridicule.
Tout le charisme est à la charge d'un Han Solo qui passe son temps à tenter de donner de la classe au film, sûrement trop tant ses scènes débordent de dialogues et actions badass jusqu'à l’écœurement. Harrison Ford est toujours au top, mais l'on sent quand même que le bonhomme s'essouffle. Impossible pour un homme de porter seul un film de cette envergure.


Le gros point noir reste le scénario. Typiquement ce genre de film qui répond à la question : peut-on faire un bon film sans bon scénario ? Eh bien non, en tout cas pas sans un solide parti-pris artistique, des comédiens talentueux ou bien un talent génial pour filmer le vide.
Énième resucée dans la lignée d'un Jurassic World, Le Réveil de la Force pompe allègrement dans le scénario du premier opus de la trilogie originale. Pâle copie de son ainé, ce film ne recèle aucune surprise, aucune trouvaille. Tout y est prévisible à un point que je ne croyais pas possible, annihilant le moindre effet de surprise. Cela produit chez le spectateur un poil désabusé quelques bonnes crises d'hilarité. Le Reveil de la Force se révèle un condensé d'action qui résume la trilogie originale en un film, créant des situations absurdes et découvrant de toutes parts les nombreuses failles qui émaillent le récit.


On riait avec le film, on finit par rire du film.


J.J. Abrams pousse l'hommage jusqu'au plagiat, de l'esthétique oldies surannée reprise on ne sait pourquoi jusqu'à la trame narrative même. Certaines scènes vous évoqueront même trait pour trait l'illustre ancêtre dont Abrams n'ose s'écarter. Quant aux clins d’œil, ils sont si appuyés, si lourds qu'on finit par penser que le réal' a confondu déférence et obséquiosité. On comprend sa frilosité, les pressions de Disney comme de la communauté de fans.
Mais on déplore de se retrouver avec un produit de consommation pour nostalgique alors que le champ des possibles est illimité dans un univers aussi riche.


Un cinq sous forme d'espoir, espoir d'être surpris dans le second opus, d'y voir enfin poindre une prise de risque.
Un cinq en demi-teinte, puisqu'on ne passe pas un mauvais moment mais que dès que l'on y réfléchit, une montagne de défaut nous vient immédiatement à l'esprit.
Finalement, je suis peut-être un fan qui s'ignore, déçu de ne pas avoir vu MON Star Wars idéal. Va savoir.



Zone spoiler :



Sur le plan de la caractérisation, ce Star Wars est à la limite du catastrophique. Kylo Ren (pour ne pas le citer) qui pique ses crises d'enfant, la scène pathétique qui vire à l'hilarant entre lui et Solo, rappel discret (ironie) à une autre scène emblématique. Son thème musical effacé ne contribue pas du tout à le rendre mémorable. Pire, son caractère de chiffe molle démontre l'échec d'Abrams qui voulait probablement en faire un type torturé mais qui finit par en faire une sorte d'émo en pleine adolescence. Suprême injure, le cancrelat finira par se faire botter les seufs par une pauvre pilleuse d'épaves qui deux jours plus tôt ne savait même pas que les jedis existaient. Le combat final est minable autant qu'incohérent.
Pourquoi lutte t-il contre Finn alors qu'un petit usage de la force aurait suffit pour le tuer ?
Pourquoi peine t-il à attirer le sabre de Luke à lui alors que Rey tire dans le même sens ?
Pourquoi est-il si nul alors qu'il est entrainé par Luke puis partiellement par un maître Sith ?
Pourquoi après avoir réussi à se débarrasser de l'acteur jouant Anakin faire une telle ERREUR de casting ?
Pourquoi les sabres lasers ils parlent comme l'anneau unique et quand tu touches t'as une vision ?
Pourquoi une résistance lorsqu'il y a une république ?
Pourquoi une telle absence de contexte ?
Pourquoi Rey devine t-elle comment imposer sa volonté à un garde alors que la scène d'avant elle ne sait pas ce que c'est que la force ?
Pourquoi Kylo Ren, lorsqu'elle s'échappe et qu'elle est dans le bâtiment, ne parvient-il pas tout simplement à savoir où elle est alors que quand Han Solo s'approche à 50 kilomètres il sait qu'il est là ?
Pourquoi avoir choisi un super-vilain aussi moche ?
Pourquoi n'avoir humanisé que Finn dans le camp des Stoorm ? Est-il le seul à ressentir des choses ? Mmmh ?

Petitbarbu
5
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le 11 janv. 2016

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Petitbarbu

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