Starbuck
7.1
Starbuck

Film de Ken Scott (2011)

Où l'on nie la positivité de la vie en-soi.

J'ai bien ri durant le film, c'est une bonne comédie. Mais elle rit d'une situation en faisant passer un message bien moins drôle que ce qu'il n'y paraît - je veux dire par là que le film présenterait comme évidente une chose qui ne l'est pas du tout, à savoir la façon dont on peut/doit considérer les liens familiaux et la filiation.

Pour le dire assez brièvement, ce pauvre Starbuck se retrouve avec quasi 150 enfants nés de sa semence qui veulent connaître son identité pour - en fait - un peu mieux connaître la leur. Comme si leur vie était incomplète sans avoir cette information, comme s'ils n'étaient pas un "tout" en eux-mêmes sans connaître le porteur de (la moitié) de leurs gènes. Plus surprenant encore, ce besoin psychologique fédère même tous ces ados en famille. La "vraie famille" tel qu'il est dit plusieurs fois explicitement dans le film. A une autre occasion un des enfants dit à Starbuck "les gens normaux sont le fruit d'un acte d'amour entre deux personnes, moi je suis le fruit d'un acte entre toi et un pot". Le pauvre en conclut à l'inexorable destin de "ne pas être comme les autres".

J'ai envie de dire : WTF ?

Le film véhicule comme ça cette idée que la génétique est le repère primordial de la filiation. La distinction entre géniteur et parent est ainsi effacée au profit d'une fusion entre les deux - jamais on ne verra les parents "non naturels" (ni les mères !!!) des enfants en question, relégués à l'arrière plan de leur vie collective. Ca n'aurait peut-être pas servi le caractère comique du film, mais ça aurait grandement aidé à nuancer un propos qui, éthiquement, s'engage sur des pentes douteuses : ce qui est nié ici c'est le caractère positif en soi du fait d'être en vie. Le vie cesse d'être auto-suffisante comme manifestation pour devenir relative à la reconnaissance du géniteur, lequel n'a joué aucun rôle dans la maturation, l'éducation, et la survie des enfants en question.

Il suffit de transposer cela aux cas d'enfants "non désirés" qui naissent tout de même : d'après cette vision de la famille, l'épanouissement individuel leur serait totalement interdit, étant donné que le lien au géniteur/parent est basé sur un rejet anticipatif. Quid ? Je rêve d'une comédie dans les mêmes tons qui prennent plus au sérieux la dimension éthique de son discours, elle pourrait faire rire ET réfléchir.
IIILazarusIII
6
Écrit par

Créée

le 6 août 2012

Critique lue 334 fois

1 j'aime

IIILazarusIII

Écrit par

Critique lue 334 fois

1

D'autres avis sur Starbuck

Starbuck
SanFelice
9

There's a Starbuck waiting in the sky

David est un loser, un vrai, un dur (enfin non : un mou). Il tente de faire pousser des plantes prohibées dans son appartement, il doit de l'argent à des personnes peu fréquentables à qui il vaut...

le 14 déc. 2013

52 j'aime

18

Starbuck
MarlBourreau
8

El Masturbator !

David Wosniak est un branleur. Au sens propre comme au figuré. Eternel loser irresponsable, il donnait anonymement du sperme sous le pseudonyme de Starbuck pour se faire un peu d'argent.Sauf que...

le 12 juil. 2013

42 j'aime

Starbuck
Before-Sunrise
8

« Ne te reproduis jamais ! »

Sur une idée de base brillante, Starbuck ne scintille pas par une écriture ciselée ou par des personnages d’une grande profondeur. Le film éblouit plutôt par son ambiance, sa grâce et les éclats de...

le 11 juil. 2013

42 j'aime

3

Du même critique

Forrest Gump
IIILazarusIII
9

Pas l'histoire d'un idiot, l'histoire d'un "surhomme".

Forrest Gump est pense-t-on souvent l'histoire d'un idiot, qui est le prétexte à revisiter l'histoire des U.S.A.. Son regard naïf est idéal pour nous permettre de revivre ces moments clés avec une...

le 10 déc. 2010

209 j'aime

16

Wall-E
IIILazarusIII
9

Un poème, un poème.

Mettre 9 à Wall-E ça me fait bizarre, mais quand je clique sur 8 je ressens comme un sentiment d'injustice. Les plus scrupuleux me pardonneront cet accès de générosité. Wall-E, je le vois comme un...

le 17 déc. 2010

102 j'aime

11

Hotline Miami
IIILazarusIII
9

Un délice pour philosophe.

Alors là faut pas déconner. Hotline Miami est énorme. É-no-rmeuh. C'est une expérience intraitable sur la représentation de la violence. Mais attention : bien qu'ils soient délicieux, je ne parle ni...

le 11 janv. 2013

89 j'aime

10