Two Kings against the Devil

Tenacious D est de ces coups de foudre à nul autre pareil : navigant sur le tumultueux fleuve du rock (et autres registres affiliés) tout en le chamboulant, le tandem formé par Jack Black et Kyle Glass confine au jubilatoire. Néanmoins sa verve parodique, au point que l’étiquette « mock rock » lui soit affublée, est à la fois source de son unicité et réductrice quant à ses nombreux atouts : car s’il s’agit de sacrés clowns, n’omettons pas que ces deux clowns sont diablement doués.

Et s’ils peuvent être qualifiés de musiciens émérites, le petit comme le grand écran ne leurs sont pas étrangers : la carrière de JB est à ce titre des plus notoires, KG étant plus discret, mais leur association fait surtout de Tenacious D une entité s’étant développée au-delà du simple spectre musical. Par l’entremise d’une (courte) série d’abord, puis via The Pick of Destiny, film et sujet véritable de ce papier qui retrace la genèse fictive du Meilleur Groupe du Monde.

Récent inconditionnel de leur discographie, au point de trépigner à l’idée de les voir prochainement en concert, l’heure était donc (enfin) venue de répondre à la question suivante : faut-il y voir un simple long-métrage se destinant exclusivement aux fans purs et durs, ou bien peut-il prétendre à davantage ? Répondre par l’affirmative est assurément délicat : de par l’osmose imparable et délectable qu’il tire de sa bande-originale, devenue à juste titre le second album de deux lascars, The Pick of Destiny est un délire matérialisant les nombreuses idées farfelues (et souvent graveleuses) de ces derniers... le tout sans réel garde-fou.

Du jusqu’au-boutisme jusque sous la ceinture donc, Liam Lynch mettant en scène avec les moyens du bords l’esprit animant le D : le film a donc tout du délire entre potes avec, justement, les comparses de toujours (Dave Grohl) et des références explicites de bon aloi (Dio), tout en brodant de son mieux un semblant d’intrigue puisant dans un univers ne se prenant pas au sérieux. La farce est ainsi des plus totales : pourtant, outre le plaisir typiquement subjectif, The Pick of Destiny est une petite curiosité versant dans un hommage généreux, ses nombreux clins d’œil à l’industrie cinématographique (Kubrick pour n’en citer qu’un) soulignant fort bien le foisonnement d’influences habitant le groupe.

Mais pour qui découvrirait son œuvre d’abord par le biais du long-métrage, sa réception serait des plus incertaines : si quelques lignes de dialogues et autres gags pourront faire mouche, l’ensemble demeure quelque peu faible en tant que produit purement ciné’. Sa bande-originale se suffisant toutefois à elle-même, nous ne saurions que conseiller à tous ces chanceux ne connaissant pas encore le D que d’ouvrir grand leurs esgourdes, car ces deux diablotins en ont sous la pédale : Satan lui-même peut en témoigner !