Difficile de résister à voir ce film au cinéma, pour des raisons plus ou moins bonnes. Un film en noir et blanc et muet à l'ère du cinéma en 3D, de la musique de film tonitruante et du montage frénétique ne peut que susciter la curiosité. Le fait que ce film ait récolté (à ce jour) soixante-neuf récompenses dont cinq Oscars, parmi lesquels ceux de meilleur film et de meilleur acteur pour Jean Dujardin, premier Français à être récompensé dans cette catégorie, est un attrait supplémentaire. Sans oublier les avis très positifs d'une large majorité de spectateurs, plus fiables que les avis des critiques de cinéma.
Le film passe dans une petite salle mais ce n'est pas un inconvénient car la première surprise est de voir une image carrée ! Comme aux débuts du cinéma, sans doute. Les logos des producteurs au début du film sont également en noir et blanc. Il est évident que pour apprécier (ou pas) ce véritable pastiche, il faut faire abstraction de toutes les caractéristiques du cinéma moderne, que j'ai citées dans ma seconde phrase. Il faut tenter de se replacer à la fin de l'époque du cinéma muet pour accepter le scénario simple et surtout le jeu exagéré des comédiens. Mais la force du film est justement là : privés de la parole et de toutes les intonations de la voix qui véhiculent informations et sentiments, les acteurs ne peuvent avoir recours qu'à leur expression corporelle, à la mobilité de leur visage et à leurs expressions. Si on accepte ce challenge, alors force est d'admettre que seul Jean Dujardin, actuellement, a pu produire une telle performance. Cet acteur simple, plutôt discret jusqu'à maintenant, avait déjà montré ses talents de mimétisme dans les films OSS 117. Jean Dujardin et Bérénice Bejo crèvent l'écran et focalisent l'attention, les seconds rôles n'étant que des faire-valoir (même si on reconnait Malcolm McDowell et John Goodman). Sans oublier le chien, acteur à part entière, et pièce maîtresse du scénario.
J'ai été particulièrement étonné et impressionné par les nombreuses et longues minutes de silence total dans la salle : seulement l'image, pas de dialogues, interruption de la musique et des spectateurs respectueux, qui ne toussaient pas, ne parlaient pas et ne mangeaient pas de pop corn. Un régal !
Un seul conseil : avant de suivre les détracteurs ou les amateurs du film, faites abstraction de la surmédiatisation, allez le voir, l'expérience vaut le coup sans hésiter.