Nowhere

Jusqu’ici Sofia Coppola était sur une très bonne voie, Virgin Suicide est un bijou, Lost in Translation est un chef d’œuvre, Marie Antoinette est tout à fait correct et dans la même lignée. Mais ensuite arrive Somewhere, que je trouve assez stupide et incohérent mais tout de même assez intelligent sur l’aspect visuel, mais le côté antipathique du personnage était vraiment mal exploité, à mon gout. Et malheureusement pour moi, tout cela s’est retrouvé amplifié dans son dernier film : The Bling Ring.

Là où les premiers films de Sofia étaient intéressants c’est qu’ils nous montraient des personnages qui n’étaient pas forcément antipathique mais pas sympathique pour autant, en les montrant toujours de façon bienveillante. Les films nous apprenaient à connaitre leurs personnages en profondeur et peut être même à les apprécier tout en restant assez critique envers eux, on y comprenait leurs défauts mais surtout leurs qualités. Des films profondément bienveillants et humains. Et puis dans Somewhere elle a voulu s’écarter un peu de ça, avec un personnage principal antipathique, et même si le tout était assez incohérent, au moins ça ne l’était pas sur cet aspect, on sentait que le film voulait un peu faire passez ce type pour un trou du cul.

Et c’est là que The Bling Ring pose problème, il ne nous dit rien sur ses personnages ou sur les situations dans lesquelles ils se trouvent, il se contente de montrer froidement leurs actions ou même leur inaction globale qui est présente durant tout le film. Dans tous ses films, Sofia a un vrai talent pour faire fusionner ses films avec ses personnages, même dans Somewhere qui arrivait à devenir aussi chiant que son personnage principal, cela gardait un sens. Mais ici, dans le cas de personnages vides, je ne vois pas où est l’intérêt de procéder de la même manière, surtout que ces gens ne connaissent aucune évolution, ils sont toujours les mêmes du début à la fin, ce n’est pas comme si on voulait les faire changer. Et cela devient d’autant plus ambigu que par moment, c’est un peu comme si ces gens s’étaient filmé eux même pour se mettre en valeur, filmé par webcam ou faussement sublimés par un ralenti, et là où c’est presque explicité c’est avec les musiques, je sais bien que cela reste subjectif, mais ces musiques insupportables écoutées par ces gens sont parfois utilisé de façon extra diégétiques comme si le film cherchait encore à les mettre en valeur, cela devient presque malsain, ou incohérent à la limite. C’est en faisant cela que le film ne prend finalement jamais parti et dit absolument rien. Comme le film devient comme ces personnages, il en devient vide et inintéressant. Cela passe aussi par le fait que dans ce film, rien n’a d’importance, il n’y a aucunes conséquences et aucuns enjeux. Mais j’admets quand même que cet aspect est assez intéressant puisque cela colle avec cette idée de fusion entre le film et les personnages mais cela n’évoque finalement pas grand-chose appart des thématiques déjà évoqué (implicitement) dans Virgin Suicide, et également dans dans marie Antoinette pour ce qui est des musiques (sauf que la ça n’a aucun intérêt puisque les musiques utilisé sont celles qu’écoute les personnages).

Et donc au final si l’on prend ce film au sein de la filmographie de sa réalisatrice, on y retrouve bien cette vision d’auteure mais sans un seul élément nouveau, il y a les mêmes thématiques qu’avant et l’esthétique est globalement la même que dans Somewhere avec en plus une mise en scène incohérente. Même si j’au bien aimé la fin et son côté cynique, quand j’y ai réfléchi ensuite, rien ne disait réellement que c’était du cynisme. Parce que d’un seul coup le film aurait pris un parti ? Et non, ce n’était encore une fois qu’une incohérence avec un faux retournement de point de vu. Parce que du coup, en prenant simplement le film pour ce qu’il est, indépendamment de sa filmographie, il ne dit rien, souffre de son manque de prise position et n’a aucun intérêt à part peut êtres les quelques rares plans qui expliciterait éventuellement un point de vue distinct, pour cet aspect sans limites et sans enjeux ou conséquences, mais qui risque d’énerver plus d’un spectateur, ce film n’a donc pas grand-chose à offrir.

J’ai toujours pensé que faire de bons films sur des personnages antipathiques était quelque chose d’extrêmement compliqué et que c’était réservé aux très très grand réalisateurs, surtout lorsqu’il s’agit de faire fusionner le film avec ses personnages.

Bien sûr que connaissant la filmographie de Sofia Coppola, je me doute qu’elle ne cherche pas à mettre ces gens en valeur et encore moins à les sublimer, mais ce n’est jamais dit dans le film. Au cinéma, on considère souvent la suggestion ou l’évocation par le « non dit » et surtout le « non montrer » comme une qualité, qu’il vaut mieux pousser le spectateur à réfléchir et à trouver ses réponses et même ses questions par lui-même. Et lorsqu’un film arrive à faire cela correctement, c’est très souvent un exploit. Mais pour faire cela il faut tout de même que ce soit le film qui fasse le premier pas et qu’il se suffise en lui-même, c’est par le film que les idées doivent passer en premier pour laisser le spectateur les développer de son côté, il faut au moins un matériau de base, ce que The Bling Ring ne donne pas.

En revoyant ce film nous serons un peu comme le personnage de Somewhere, et c’est peut être ça, le message pas suffisamment explicité de The Bling Ring, « Nous marcherons sur une route, qui ne mène nulle part ».

*Je ne m’attendais pas à citer l’un des meilleurs films du monde dans cette critique…