Kim Ki-Duk est un réalisateur hyper-actif, plus aimé hors de sa Corée du Sud. Les sujets de ses films sont souvent liés à ses propres expériences (dès son premier film, Crocodile) : jeune adulte il passe cinq ans dans la marine, deux décennies avant son 'blockbuster' Coast Guard (porté par la star locale Jang Dong-gun). Cet opus arrive après une vague de succès, le décollage de sa carrière et l'obtention d'un certain prestige en Europe (notamment à cause de L’Île – 2000).


Le contexte est analogue à celui du JSA de Park Chan-Wook, centré sur la zone commune de sécurité située à la frontière des deux Corées et supervisée par l'ONU. Une nuit un des garde-côtes abat par erreur un civil qui a eu le tort d'oublier la zone militaire et ne voir que la plage. Écrasé par la culpabilité et l'absurdité de la situation, il sombre dans la dépression, voire dans la démence. À travers ce personnage détraqué par le climat de guerre et l'absurdité des missions, Ki-Duk dénonce l'attitude suicidaire des Corées, regrette leur séparation et les privations que s'impose le Sud. Les personnages en général sont soumis à la démonstration de cette supposée folie, fades ou éteints par ailleurs.


Le spectacle est envoûtant, dense en images et volontaire en sentiments, pauvre en réflexion. TCG tourne à vide, brasse trop et tient au final du film d'action contemplatif enveloppé dans un halo romantique et morbide. Kang Sang-byeong reste enfermé dans ses souvenirs, travaillé par des traumatismes. Ses expériences confuses et éprouvantes ouvrent au fantastique, plutôt qu'à un approfondissement 'moral' ou psychologique. Le génie de Kim-Duk consiste à retenir les vertus graphiques d'un gâchis, esthétiser la mélancolie (avec quelques déviations en surface : vue sous lunettes nocturnes, éclats gores), en revenant sur les bons moments et fétichisant les pics d'intensité. Un voile d'ironie masque des réflexes compassionnels. Le résultat est dynamique mais lointain, les apparences violentes et aériennes.


https://zogarok.wordpress.com/2016/07/14/the-coast-guard-ki-duk-2002/

Créée

le 13 juil. 2016

Critique lue 395 fois

1 j'aime

Zogarok

Écrit par

Critique lue 395 fois

1

D'autres avis sur The Coast Guard

The Coast Guard
Ryo_Saeba
6

Critique de The Coast Guard par Ryo_Saeba

Le film se passe sur les côtes de la Corée du Sud et une petite introduction nous apprend que depuis la guerre de Corée, et même encore aujourd'hui, toute personne franchissant les barrières de la...

le 2 oct. 2010

5 j'aime

The Coast Guard
Mise-en-trope
6

Attirail Auteuriste

Nord/Sud. Deux points cardinaux irréconciliables au centre névralgique mélancolique. L'éternel déchirement, celui qui meurtri et hante les consciences coréennes depuis maintenant 75 ans. Une hantise...

le 26 févr. 2020

1 j'aime

The Coast Guard
Zogarok
6

Chant du cygne

Kim Ki-Duk est un réalisateur hyper-actif, plus aimé hors de sa Corée du Sud. Les sujets de ses films sont souvent liés à ses propres expériences (dès son premier film, Crocodile) : jeune adulte...

le 13 juil. 2016

1 j'aime

Du même critique

La Haine
Zogarok
3

Les "bons" ploucs de banlieue

En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...

le 13 nov. 2013

49 j'aime

20

Kirikou et la Sorcière
Zogarok
10

Le pacificateur

C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...

le 11 févr. 2015

48 j'aime

4

Les Visiteurs
Zogarok
9

Mysticisme folklo

L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...

le 8 déc. 2014

31 j'aime

2