La chronique qui n'en revient pas... Et pourtant elle devrait !

En voilà un film qui devrait partager les spectateurs. En sortant de la salle, les réactions oscillaient entre "quel chef d'œuvre !" et "quelle daube !".
Oui, oui, ce film ne laisse pas indifférent. Et c'est exactement ce qu'on est en droit aussi d'attendre d'un film : qu'il provoque des réactions.


Et pourtant de charme, il n'en manque pas.


Pour commencer, la scène d'ouverture, magistrale sauvage et dangereuse met tout de suite dans le bain. A la manière d'un Steven Spielberg dans "Il faut sauver le soldat Ryan", le spectateur est immergé dans un chaos apocalyptique et sanguinolent. Premier point d'orgue.


S'ensuit quelques minutes plus tard une scène de combat mano à mano avec un ours. Viscérale, animale, effrayante. Deuxième point d'orgue.


Puis démarre, mais paradoxalement ralentit, le film et sa quête désespérée de vengeance et de rétribution d'un homme trahi, abandonné et laissé pour mort envers ses compatriotes peu amènes à le voir revenir vivant.


Malheureusement, le film souffre de longueurs, c'est à dire d'une durée inversement proportionnelle à son intérêt. En effet, sur une durée totale de 2h40 l'on assiste pendant près de deux heures, à un parcours expiatoire d'un homme grièvement blessé qui va ramper pendant des jours, lentement, très lentement, et se remettre doucement, très doucement de ses blessures.
Ce qui passe très bien en format livresque (le film est tiré du roman "Le Revenant" de Michael Punke dont vous pourrez lire la chronique en cliquant ici) se révèle ennuyeux lors de la mise en image. Passé l'aspect contemplatif, loin d'être inintéressant et même plutôt sublime, le côté répétitif de certaines scènes nuit à l'immersion du spectateur.


En revanche, ce film est d'une beauté formelle, chaque flocon de neige, chaque goutte d'eau, chaque souffle est une fenêtre ouverte sur le monde et respire la vie. Une ode à la nature, majestueuse mais meurtrière, flamboyante mais fatale.


Iñárritu filme les visages de près et les paysages de loin. Un contraste saisissant. Il utilise des focales déformées amplifiant le malaise et la sensation d'immensité. Un trip hallucinatoire dont les images déformées créent une illusion de dérive. Des relents de l'expressionnisme allemand s'il fallait chercher des influences.


Film survivaliste, "The Revenant" nous entraine aux limites du montrable et de la bienséance. Le réalisateur avec son approche naturaliste n'hésite pas à nous détailler blessures, déchirures, meurtrissures, écorchures et j'en passe. Du gore réaliste.
On va se le dire, c'est degueu, craspec, peu ragoûtant mais c'est superbement filmé. C'est ce qui fait heureusement la différence.


De son côté, Leonardo Di Caprio nous livre une performance fabuleuse, quasi-muette, intense et définitive. On peut bien arguer sur le fait que le traitement du personnage, de par son état, soit monolithique, l'acteur lui apporte une dimension quasi-christique et son chemin de croix le mènera peut-être au panthéon des comédiens : l'Oscar !


http://cestcontagieux.com/2016/02/24/the-revenant-de-alejandro-gonzalez-inarritu-la-chronique-qui-nen-revient-pas-et-pourtant-elle-devrait/

David_Smadja
7
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le 24 févr. 2016

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David Smadja

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