Les biopics ont toujours quelque chose de prévisible. En effet, la surprise réside essentiellement dans le parti prix du réalisateur pour aborder une vie plus ou moins connue du grand public. Ici, Dome Karukoski se plonge dans les jeunes années du futur écrivain de fantasy JRR Tolkien ; sa jeunesse d'orphelin, ses pertes, son amour intense, ses amitiés fraternelles, la guerre... Ce sont ces éléments qui ont forgé cet esprit inventif et qui ont nourri son imaginaire débordant. Sans prétention, et en semant des indices subtils sur sa future oeuvre emblématique Le seigneur des anneaux, il s'immisce dans la tête d'un écrivain, dans toute sa complexité et sa richesse. La tâche est risquée mais à la sortie de la salle, on a vraiment l'impression d'être remonté aux origines de la création, en décryptant la matière dont sont faits les rêves. Comme Tolkien était un grand intellectuel, ce processus de création passe avant tout par la parole et si on ne se laisse pas étouffer par ces dialogues touffus, ça s'avère étonnant ! Fasciné et extrêmement doué pour inventer une langue, il entretient un lien tout particulier avec son professeur en philologie ; j'ai trouvé ces échanges fascinants et extrêmement bien retranscrits. Cette verve est défendue avec fougue, audace et provocation due au jeune âge des personnages. Les acteurs sont tous plein d'entrain et convaincant avec une mention particulière pour Nicholas Hoult dont le jeu millimétré et condensé intrigue et bouleverse. L'émotion s'en dégage indubitablement. Les décors sont splendides ; entre les couloirs académique qui reflètent l'innocence et l'apprentissage, les tranchées de la guerre qui apportent une obscurité hallucinatoire et les décors automnales où la vie de famille se veut sereine. Bref, j'ai trouvé la réalisation saisissante de beauté, révélatrice d'une vie d'acharnement et de passion et qui n'a peur de rien. C'est romanesque, poétique, élégant, touchant et l'intrusion des créatures fantastiques sur le champ de bataille m'a donné des frissons. Donc même si c'est bavard, même si c'est classique, Tolkien rend fidèlement hommage à un génie.