Je ne savais rien de ce film avant de le voir et en sortant de là, je pense avoir vu un grand film. C'est le genre de film qui ne paye pas de mine, mais qui arrive à réveiller chez le spectateur des émotions fortes de par sa grande beauté. J'ai vu le film sans sous-titres, je pensais qu'il était en français (la présence de Vincent Gallo aurait dû me mettre la puce à l'oreille) et ce n'est absolument pas gênant, c'est un film où l'on parle très peu et où on ressent beaucoup.


Tout passe par la mise en scène, le montage, la musique (sublime et magnifiquement bien utilisée). Claire Denis sait filmer les corps, elle sait filmer la tendresse entre eux, mais aussi et surtout une sorte de malaise, de désir gênant... Je pense à la première rencontre encore Gallo et la femme de ménage obligée de porter ses bagages jusqu'à sa chambre d'hôtel, lui est avec sa femme, mais quelque chose ne va pas... Le visage trop maquillé de la femme de ménage est filmé de bien trop près, d'une manière bien trop sensuelle pour ne pas gêner. Qu'est-ce-qui se passe... ?


Et comme ça, sans rien dire, Claire Denis nous raconte beaucoup de choses sur les êtres, leurs relations, leurs désirs. C'est un film qui en parle beaucoup, du désir. C'est d'ailleurs la question principale, être atteint d'un mal qui pousse jusqu'à un désir trop violent pour que l'autre y survive.


Claire Denis revisite ainsi le film de zombies d'une manière tout à fait particulière et assez étrange, tant cette sensualité des corps ne rime d'habitude pas avec la chair putréfiée. Elle rend un petit hommage subtil aux séries B du genre en changeant la photographie lors des flashback, passant à une image bien plus granuleuse, bien moins détaillée évoquant plus les hommages façon Tarantino que le film d'auteur français.


On comprend petit à petit pourquoi Gallo préfère se masturber dans son lit pendant que sa femme prend un bain, pourquoi il préfère aller se finir et éjaculer loin d'elle... Le désir, toujours et encore lui, celui qui dévore, celui qui tue.


Tout ceci n'est jamais clairement explicité, c'est surtout ressenti et réussir à faire sentir ce désir, cette violence dans le rapprochement des corps je trouve ça magnifique.


Claire Denis propose ici un cinéma viscéral et totalement sensoriel, qui pourra laisser certains spectateurs sur le côté, mais surtout fasciner celui qui pourra entrer dans ce film à la musique lancinante, sublimant ainsi ces corps ne rêvant que de s'arracher de passion charnelle.
L'érotisme dans le cannibalisme.

Moizi
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le 10 sept. 2016

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