Sans trop de surprise, Extraction se la joue gros bras sans jamais réinventer le genre du « one against all », mais avec suffisamment d’efficacité dans la forme pour divertir : dans la droite lignée du dégommage de PNJ à la pelle qu’est John Wick, cette nouvelle distribution Netflix adaptée d’un comics (Ciudad) vaut donc surtout pour sa tête d’affiche (Chris Hemsworth) et son jusqu’au-boutisme prenant.
Nous projetant en Inde puis au Bangladesh, Extraction embrasse à l’envie leur climat tropical au moyen de la chaude photographie de Brandon Cox : le film s’éloigne ainsi des empreintes d’un Wick ou d’un McCall, car états-uniennes mais surtout urbaines comme nocturnes, et convoque dès lors un ballet fait de sueur et de sang sous un soleil pesant. Se nichant au cœur d’environnements proches du dédale, le récit maintient aussi l’immersion d’un bout à l’autre, ne décélérant qu’avec une extrême parcimonie.
Homme de cascade (notamment pour le compte du MCU) rappelant David Leitch et Chad Stahelski, Sam Hargrave semblait être l’homme de la situation : sur un scénario de Joe Russo (qu’il connaît bien et qui est, apparemment, à l’origine de la BD avec son frangin), le rookie réalisateur assure un divertissement âpre et sanguinolent, frisant parfois avec l’exagération mais doué d’une violence implacable, confinant à l’étouffant car diablement rythmée. Chorégraphiquement réussi, Extraction s’avère par voie de fait formellement convaincant, quand bien même sa plastique devrait être banale sitôt son cadre asiatique assimilé.
Puis émerge une invariable question : le fond est-il, comme d’usage dans ce genre de production, creux à souhait ? Pas totalement bien sûr, car comme dans les films préalablement évoqués, Extraction n’omet pas de mettre à mal son protagoniste sur le plan physique comme moral : de fait, les innombrables coups et blessures récoltés, dont le cumul atteindra des proportions gargantuesques, se font le reflet d’une perdition contée au gré de flashbacks sans équivoque.
Dans un registre davantage suicidaire que vengeur, les failles intérieures d’un Tyler Rake invincible (ou presque) tendent à justifier (toute proportion gardée) la lutte en roue libre qu’il mènera d’un bout à l’autre : un background qui, complété par le jeu probant de Chris Hemsworth, tend aussi à humaniser la machine à tuer qu’il incarne, l’attendrir et mieux capitaliser sur sa relation avec l’infortuné Ovi, nullement relégué au rang de bagage. Certes, rien de nouveau au soleil ni de transcendant, mais convenons que l’effort est là, comme peut en attester ce jeu de dupes et d’alliances entre les diverses forces à l’œuvre.
Pour le reste, Extraction abonde dans le sens d’une trame pourvue d’archétypes lourdauds, chose parfaitement mise en exergue par cet énième univers de trafiquants cruels et sans scrupules : exception faite d’un Saru rebattant les cartes, ou d’un Gaspar ambivalent (quoique très prévisible), il n’y a donc guère à se mettre sous la dent.
Quant à sa fin ouverte, qui n’en est pas vraiment une au regard de son dernier plan, la curiosité est de mise si une suite voit le jour comme annoncé : mais gare à la vilaine redite !