Un heureux événement par Architrave
Comme dans Le Premier Jour du Reste de ta Vie, on voit ici tout le talent de Rémi Bezançon. Celui de représenter la vie avec une exactitude et une poésie qui arrivent à s'harmoniser pour former une chose magnifique devant nos yeux ébahis.
Nos yeux ébahis par l'odyssée de la vie, car au fond, qu'est-ce qui est plus beau que d'avoir un enfant ? Ce bonheur lors de l'annonce, cette attente entre excitation et peur, cette douleur de l'accouchement remplacé par le bonheur intense de tenir son enfant entre ses bras. Dès la première seconde, le réalisateur nous montre tout son talent : les cris orgasmiques du couple sont associés à des images de lumière, de petites étincelles, de couleurs, des images pures, belles et déjà d'une grande poésie. Les étincelles, c'est la vie qui crépite dans le ventre de Barbara et, alors que grand nombre de personnes pourraient en être choquées, les cris de plaisir des deux amoureux sont entendus avec une douceur paradoxale, un calme pourtant si mouvementé.
Quand Barbara découvre qu'elle est enceinte, elle est clairement dans sa salle de bain avec son test de grossesse, tout le monde l'aura compris. Mais le réalisateur fait le choix de mettre des décors noirs et pailletés, comme si nous étions dans l'esprit de Barbara, ces décors donnant à la scène une grande intimité, et telles des étoiles dans le ciel, inspirent forcément la joie, la beauté, et donc ce qu'il se passe dans la tête de celle qui regarde fébrilement son test, en attente d'un trait vertical ou pas.
Dans les premières minutes du film, la poésie ne s'amoindrit pas : la scène des dvds dans le vidéo club est à la fois drôle et touchante. On s'accroche déjà aux personnages, car on commence à voir leur personnalité extrêmement travaillée et en même temps vraie, et qui plus est subtile. Chaque sourire, chaque expression et chaque mouvement n'est pas du tout exagéré, les petits regards suffisent à ce que l'on comprenne tout.
Toute la première partie du film passe, normalement. Puis on arrive à la scène de l'accouchement, ou plutôt les scènes, du moment où elle arrive à l'hôpital à celui où elle est dans son lit avec sa fille. Ces scènes sont les meilleures du film : on a peur, on rit, on ne rit plus, on rit, on fait baaaaah, on adore Barbara, puis son mari, puis le bébé. Tout s'enchaine parfaitement, les acteurs sont justes, je ne peux expliquer pourquoi cette scène est si magnifique. C'est juste le cas.
Ensuite arrive la deuxième partie, plus sombre. On voit la fatigue arriver petit à petit, remplacer le bonheur par des corvées, des obligations, des privations, et on a l'impression que ça ne s'arrêtera jamais. La fatigue est de plus en plus présente, alors on craque. C'est ce que dit Barbara, "je craque". Le couple ne tient plus, elle touche le fond, lui est tantôt égoïste, tantôt courageux. Alors elle essaie de se donner un peu de temps à elle et elle sort avec ses copines. Tout empire. Elle se réveille et le canapé tangue littéralement (je suis sûr que vous ne l'avez pas vu), comme son esprit qui ne sait plus à quoi s'accrocher et qui est perdu dans cette immensité du devoir de parent. Barbara se sent vidée, elle ne ressent plus de plaisir à coucher avec son homme, elle n'est presque pas sortie pendant un an, et l'atmosphère devient de plus en plus pesante. Cette deuxième partie est superbement bien jouée et filmée, toujours dans une vérité qui transcende l'écran, une justesse extrême.
Puis tout devient plus léger, on respire enfin. Et la fin arrive, aussi belle que le début. La dernière phrase, la dernière image nous coupe le souffle, pour finir le film sur une note de beauté absolue. Une vraie fin qui plait et qui ne laisse pas insatisfait : Rémi Bezançon nous a montré tout son talent et c'était beau, c'était bien.
Les acteurs sont tous géniaux, mention spéciale à Pio Marmai qui, avec une simple expression, peut arriver à jouer un serial killer autant qu'un jeune amoureux. Mais mention spéciale à Louise Bourgoin aussi, surtout lors de la scène de l'accouchement, parce qu'on s'y croit vraiment, et puis qu'un SALOOOOOPE ça fait toujours du bien. Anais et Daphné Burki sont comme quand elles ne sont pas actrices, vraiment géniales, je les aime, Daphné Burki ça fait 3 ans que je veux l'épouser et ce film ne fait que confirmer mes dires.
La musique de Sinclair n'est pas moins bonne que tout le reste, j'ai même réussi à penser à du Kubrick entre cette musique et les images irréelles à quelques moments du film. C'est fort, quand même. Rien que d'y penser, ça force l'admiration.
Et, pour finir, l'humour est excellent. Et il n'y a rien à dire de plus là dessus.
Un heureux événement m'a transporté dans le monde que je voulais, j'aurais sinon été très déçu. La poésie que j'attendais est apparue devant mes yeux, les acteurs furent à la hauteur, la musique et la réalisation excellentes, complétées par un humour à la fois subtil et grossier mais toujours aussi bon. Et puis ce que je recherchais vraiment, c'est cette vérité, dans le bonheur et le malheur, et je l'ai eue, et c'était beau.
Pour les personnes vraiment réfractaires aux films français comme celui là, on voit le torse de Pio Marmai et les seins de Louise Bourgoin. Et ils couchent 4 ou 5 fois ensemble dans le film. Et pour ceux que ça n'intéresse toujours pas, le bébé est tromignon. Vous n'avez plus d'argument valides pour ne pas aller voir ce film, à présent.