Si vous êtes là, c'est que ce film vous intrigue...
Un film comme ça, c'est sur, on peut le qualifier de
Pas banal...
Et bien plus encore. D'ailleurs, si vous voulez savoir ce que j'ai pensé du film
Regardez la première lettre de chaque ligne de cette intro et vous le saurez.


On aurait pu appeler ce film "Du pouvoir du désoeuvrement".
David Robert Mitchell créé une oeuvre basée sur un ensemble de références, de clichés et d'attentes pour mener à bien un exercice qui est loin d'être évident: la construction d'un complot qui tient la route. Et cette réussite tient à mon sens à deux éléments en particulier.


D'une part, la caractérisation du personnage principal et la relation qu'il entretient avec son environnement. On suit Andrew Garfield, qui façonne ici un portrait magnifique de loser désoeuvré. D'où l'idée que je trouve brillante: C'est parce qu'il est désoeuvré, qu'il n'a rien de mieux à faire, qu'il passe littéralement son temps à fureter à droite à gauche, à se demander s'il y a un message caché dans "une famille en or", qu'il peut tenter de dérouler la pelote de fils du complot qu'il croit découvrir. Tous ses défauts (lâcheté, irresponsabilité, inconstance...) se transforment en qualités. Ce grand enfant n'a rien d'autre à faire que de suivre les indices qui lui tombent dans le creux de la main et s'investir dans la résolution du mystère qui le dérange: celui de la disparition de la voisine sur laquelle il a flashé. Pour montrer cette originalité, on peut faire une comparaison rapide: le personnage est assez proche du Dude de "The Big Lebowski", mais le Dude est entraîné dans l'histoire malgré lui, et malgré ses défauts, il s'en sort. Ici, ce sont bien les défauts du protagoniste qui le rendent parfaitement équipé pour résoudre ce mystère.


D'autre part, l'utilisation de références pour construire le film. On peut en lister quelques unes pour donner une idée de l'atmosphère: On est quelque part entre le "The Long Goodbye" de Robert Altman, le "Body Double" de Brian De Palma, "Rear Window" d'Alfred Hitchcock & "Inherent vice" de Paul T. Anderson. A cela s'ajoute l'ensemble des références pop culture de manière générale dans le film et qui viennent nourrir la paranoïa du protagoniste.


Ce qui ne veut pas dire que R. Mitchell ne créé pas un univers qui lui est propre: comme dans "It Follows", il utilise l'idée de rumeur, de légende urbaine pour construire ses propres mythes (d'ailleurs son premier film s'intitule "The Myth of the American Sleepover"). Et c'est là que la conjugaison entre pop culture et les mythes construits par Mitchell fonctionne: son héros est une "antenne" à signaux. Il les capte donc dans l'ensemble de cette culture (magasines de JV vintage, boîtes de céréales, émission TV culte, ...) et les mythes spécifiques au récit (Chut chut pas de spoil). Cet ancrage permet de passer outre un risque commun aux films de complot: un univers qui n'existe qu'en référence à lui même, sans liens au monde vécu par la plupart des mortels.


Ici, je peux suivre des fils narratifs, pas nécessairement jusqu'au bout, mais suffisamment pour comprendre qu'un monde souterrain existe, régi par ses propres règles certes, mais dont les ramifications touchent "notre monde à nous". Personnellement, ça m'a aidé à suivre Andrew Garfield embrasser ses tendances paranoïaques, si chères à ce genre de cinéma.


Si je comprends tout à fait que ce genre de films ne plaise pas à tous, il me semble que ce serait une erreur de le ranger immédiatement dans la catégorie des "films un peu trippy qui n'ont pas grand chose à dire". "Under the Silver Lake" nous propose de suivre avec attention ce qu'on ne regarde même plus et d'accepter une part de folie enfantine dans la manière dont on regarde ce qui nous entoure. Certes, avec une bonne dose de ridicule, mais ce n'est pas déplaisant.

Draiv
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le 23 févr. 2019

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