On ne peut qu’encourager ce type de proposition de cinéma fantastique audacieuse et originale. Car on est vraiment dans la fantastique pur et dur ici, loin des errements récents du genre en la matière depuis quelques décennies qui se traduisaient par des films d’épouvante bas de gamme ou de l’imaginaire familial aux oripeaux merveilleux. Hormis quelques perles comme « It follows » ou « Hérédité », le genre a perdu ses lettres de noblesse depuis des années. Ce « Vivarium » de Lorcan Finnegan n’est que le second film de son réalisateur et il est diablement abouti. En lorgnant légèrement vers la science-fiction, il a la bonne idée d’être à la fois original sur le propos, formellement abouti et doté d’un sous-texte social pertinent et fort. Mais pour apprécier ce type de long-métrage, il faut aller mettre de côté ses penchants cartésiens et être friand de films bizarres et étranges. De la même manière, il faut concéder de ne pas tout comprendre. Se faire sa propre idée fait partie intégrante du jeu et du contrat passé entre le réalisateur et son spectateur.
On pense beaucoup à un épisode allongé de séries mythiques telles que « Twin Peaks », « La Quatrième dimension » ou « X-Files » avec cette œuvre au postulat dément. Quant à la forme, les réalités déformées des peintures de Dali peuvent venir à l’esprit à l’instar de tout un imaginaire collé aux banlieues anonymes devenues terrifiantes. Et c’est réussi et anxiogène à souhait sur ce point. « Vivarium » utilise la fable pour pointer du doigt, de manière un peu appuyée, le consumérisme extrême de nos sociétés capitalistes et le besoin de posséder. Tout comme celui de se fondre dans une masse formatée par des publicités vendant un rêve de normalité. Et le film dépeint parfaitement comment ces idéaux peuvent être transformés en cauchemar éveillé par le biais d’un processus narratif en huis-clos angoissant et introspectif. En creux, le pouvoir nocif de la télévision est aussi pointé du doigt.
Le duo d’acteurs est impeccable et permet une totale identification avec leurs personnages. Leur plongée dans l’enfer du conformisme et du consumérisme, poussée à l’extrême, traverse l’écran pour nous hanter comme ils le sont. Le lotissement et la maison sont en tous points horribles de perfection et la métaphore sur notre façon de vouloir vivre suit impeccablement son cours. Il y a parfois des airs de « Truman Show » cauchemardesque ici. On a droit à quelques moments de terreur et de visions dérangeantes où le bizarre nous met (vraiment) mal à l’aise, surtout avec ce petit garçon irritant offert au couple enfermé. Parfois on se dit néanmoins qu’un court-métrage d’une demi-heure aurait peut-être mieux synthétisé tout cela, « Vivarium » relevant parfois trop du film concept qui se prend les pieds dedans. En effet, comme les personnages, le dernier tiers finit par tourner un peu en rond et les points de suspension s’avèrent un peu nombreux. Mais un second visionnage pourrait éclairer certaines symboliques. En l’état, c’est stressant, bien fait et en total accord avec ce que pourrait être la notion de famille idéale dans une maison idéale avec une vie idéale poussée dans ses retranchements négatifs les plus extrêmes. Innovant, pas commun et à voir.
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